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Arabie saoudite : « Mohammed Ben Salman, l’erreur de casting »

jeudi 25 octobre 2018 par Charles

Dans une tribune au « Monde », le chercheur au CNRS Nabil Mouline estime que l’image de « réformateur » revendiquée par le prince héritier prend un sérieux coup depuis la disparition du journaliste Jamal Khashoggi.

Tribune. La mystérieuse disparition du journaliste saoudien Jamal Khashoggi, le 2 octobre, après s’être rendu au consulat de son pays à Istanbul, a sans doute levé le voile sur le vrai visage de la transition politique en Arabie saoudite, voulue par le prince héritier, Mohammed Ben Salman, dit « MBS ». Cet acte, qui rappelle à bien des égards les agissements des dictateurs arabes de la seconde moitié du XXe siècle, montre bien jusqu’où peut aller le nouvel homme fort de Riyad pour conserver son pouvoir absolu et donner à voir sa toute-puissance.
Arrivé au pouvoir à la faveur de circonstances exceptionnelles – le décès de ses trois oncles Sultan, Nayef et Abdallah entre 2011 et 2015, l’intronisation de son père et l’élection de Donald Trump –, le jeune prince, 33 ans aujourd’hui, adopte très rapidement une stratégie de communication agressive dans l’objectif de légitimer son pouvoir fraîchement acquis et de consolider son image de « modernisateur ». Séduits par les effets d’annonce, les gouvernements et les médias occidentaux prennent fait et cause pour Mohammed Ben Salman, arguant que… la fin justifie les moyens !

Grâce à la protection de son père et au soutien de Donald Trump, « MBS » entreprend, de manière aussi brutale que fulgurante, de transformer le système politique local. Le traditionnel autoritarisme collégial, plus ou moins souple, cède très rapidement la place à un autoritarisme personnel répressif.
Cela a commencé par l’élimination de tous ses rivaux au sein de la famille royale. Après s’être arrogé de larges prérogatives dans tous les domaines, Mohammed Ben Salman destitue, en 2017, le prince héritier Mohammed Ben Nayef, l’assigne à résidence, puis emprisonne un grand nombre de princes au Ritz-Carlton – notamment le puissant chef de la garde nationale, Mitab Ben Abdallah, et le milliardaire Al-Walid Ben Talal – et limite les mouvements des autres. Dans la même dynamique, il embastille,...


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