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Téléphones sur écoute : Steven Benoît accuse, Réginald Delva dément, Digicel explique

vendredi 28 novembre 2014

Le Nouvelliste |
Le sénateur de l’Ouest Steven Irvenson Benoît révèle l’existence d’un corps d’espionnage au sein du gouvernement haïtien. Selon ce qu’a rapporté le parlementaire, c’est Robert Thomas, un ancien collaborateur du ministre de l’Intérieur et des Collectivités territoriales, Réginald Delva.

Selon le sénateur Steven Benoît, ce corps d’espionnage, constitué d’une vingtaine de personnes, a son siège au ministère de l’Intérieur et des Collectivités territoriales. Sa mission principale consiste à pirater les appels téléphoniques de personnalités politiques en opposition au pouvoir en place, dont des parlementaires.

« Ces révélations ne font que confirmer ce que nous avons nous-même dénoncé depuis des lustres, indique Steven Benoît. Personnellement, mon portable est sur table d’écoute depuis environ deux ans. C’est anormal. La liberté d’expression est ici menacée. »

D’après Steven Benoît, cet ancien conseiller de l’ex-secrétaire d’Etat à la Sécurité publique, Réginald Delva, explique que les personnes constituant le réseau d’espionnage suivent et enregistrent quotidiennement les communications des opposants politiques avant de les soumettre à M. Delva pour les suites nécessaires.

Le parlementaire annonce sous peu la convocation du ministre de l’Intérieur et des Collectivités territoriales sur ce dossier. « Nous avons pris acte, a-t-il dit, sur un ton menaçant. Le ministre Réginald Delva aura à fournir des explications aux sénateurs sur cette affaire. » Steven Benoît souligne au passage que Robert Thomas est l’objet de menaces de toutes sortes de la part de Réginald Delva.

Par ailleurs, M. Benoît croit que cette opération ne peut pas se faire sans l’aval du CONATEL, principale instance régulatrice de la communication dans le pays. Les compagnies de téléphonie mobile Natcom et Digicel ne seraient pas non plus innocentes dans cette affaire, a-t-il soutenu.

Robert Thomas, le « Edward Snowden haïtien », selon Réginald Delva

Sur un ton ironique, le ministre de l’Intérieur et des Collectivités territoriales a fait savoir au Nouvelliste que Robert Thomas, sans citer son nom, a trop regardé la télévision et veut devenir le Snowden haïtien. Une façon pour Réginald Delva de dire que le gouvernement ne met personne sur écoute. « Cela n’existe pas », a-t-il avancé au Nouvelliste.

« Ce temps-là est révolu de notre côté et serait totalement illégal. C’est faux et archifaux », a-t-il démenti, rejetant d’un revers de main les révélations de Robert Thomas. « Si c’est lui qui l’avait installé, il sait où conduire les sénateurs. Ce ne sont pas des appareils qu’on traîne dans un véhicule », a-t-il dit, soulignant qu’en Haïti, on ne dispose d’aucune loi permettant de mettre des gens sur écoute téléphonique.

Le CONATEL dément également

« C’est complètement faux. Le CONATEL n’est pas là pour mettre des gens sur écoute. Le CONATEL n’a même pas la capacité technique sans entrer dans une compromission avec les opérateurs. Et je ne crois qu’aucun opérateur ferait des compromissions en ce sens avec le CONATEL… », a déclaré le directeur général du CONATEL, Jean-Marie Guillaume, joint au téléphone jeudi soir.

La Digicel apporte les explications techniques

« Déjà, il faudrait des équipements très coûteux pour faire ce genre d’opération et nous ne les avons pas », a rétorqué Maarten Boute, le patron de la Digicel. Contacté par le journal, M. Boute a indiqué que le matériel pour mettre des téléphones sur écoute ne peut être acheté que par des Etats.

Si une compagnie privée voulait faire l’acquisition de ces équipements, il lui faudrait une autorisation officielle d’un gouvernement, a-t-il dit. « C’est complètement faux. On n’a pas la capacité pour le faire… », a-t-il démenti.

Cependant, il existe une application qui permet à quelqu’un d’enregistrer les conversations téléphoniques d’une autre personne et recevoir ces conversations par Internet. Mais d’abord, il faudra que l’intéressé ait accès au téléphone de la personne qu’il veut mettre sur écoute pendant au moins une heure pour télécharger et installer l’application, explique au Nouvelliste M. Boute.

Le patron de la Digicel est formel sur une chose, il n’y a aucun équipement permettant de mettre des gens sur écoute, il n’y a aucun support qui a été donné en ce sens, aucune volonté et « on n’a pas eu non plus la demande… ».

AUTEUR

Robenson Geffrard et Yvince Hilaire


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