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Tchooko, le graffeur messager

mardi 8 octobre 2019 par Charles

En dépit des coups de feu et des flammes, la 4e édition du Festival des arts urbains a tenu sa promesse du 10 au 20 septembre 2019. Dans la foulée de cette édition qui a eu pour thème « Mobilité contemporaine - Déterritorialiser l’imaginaire », Ticket, dans une minisérie, vous propose de découvrir ces hommes et ces femmes de valeur qui ont enjolivé nos murs malgré le chaos qui prévaut actuellement dans notre pays.

Des gallons jaunes en plein combat, des animaux déçus réclamant une meilleure utilisation de leurs noms attribués à des politiciens véreux... Ces deux dessins satiriques égayent les murailles de la rue Baussan. Derrière eux, un jeune graffeur qui garde les pieds au coeur de l’actualité du pays, traduite notamment par une rareté endémique de carburant et une lutte acharnée dans les stations à essence. Tchooko, de son vrai nom Patrick Edouarzin, est ce mordu des graffitis qui croit fermement que cet art peut être porteur de messages. « Un message fort », dit-il.
Entre 2013 et 2014, c’est au cours de cette période que ce natif de Delmas a fait ses premiers pas dans le domaine. A « Pòs Machan », il a illuminé le corridor Icare, quartier général de « Rezistans », cet ancien groupe de rap kreyòl. D’où le début d’une belle aventure pour ce caricaturiste qui considère les graffitis comme un « prolongement » du genre caricatural. Son autre dada. « À l’instar des caricatures qui sont ancrées dans l’actualité, les graffitis sont également un outil d’expression. Les murs représentent le support papier tandis que les sprays sont comparables aux crayons », explique-t-il.
De cet ado qui admirait en sortant de l’école les murs tout en couleurs de la rue Nicolas, Patrick Edouarzin a depuis troqué son costume de spectateur contre celui d’acteur. C’est donc à son tour de faire rêver les autres. Ce que lui a valu sa participation aux deux dernières éditions du Festival des arts urbains, plus connu sous le nom de Festi Graffiti. « Avant de prendre part au festival en tant que graffeur, j’étais ce fan qui lors de la toute première édition regardait Jerry ou encore Assaf à l’œuvre. Et me voilà aujourd’hui parmi ceux qui donnent vie aux murs de Port-au-Prince », confie l’étudiant finissant de l’Ecole nationale des arts (ENARTS).
« J’ai marqué cette quatrième édition de Festival Graffiti avec deux dessins satiriques. ’’La bataille des gallons jaunes’’ inspiré par la pénurie d’essence de ces derniers mois, avec ces récipients peuplant dès lors nos quotidiens. Quant à ma seconde représentation, elle demeure un plaidoyer pour une utilisation positive du nom des animaux, qui restent des êtres vivants à part entière, avec des caractéristiques qui leur sont propres », poursuit Tchooko, prenant pour modèles ses aînés haïtiens Assaf et Jerry ainsi que Hombre Desuk, un graffeur hors de nos frontières.
Du haut de ses 27 ans et de ses quelques années de carrière, Monsieur voit dans son métier de graffeur un outil de « développement urbain. L’Etat peut l’utiliser dans un projet d’embellissement de certains quartiers. Parce que les gens détiennent un bon rapport avec les dessins. Ils ont souvent tendance à protéger cet art exprimé sur leurs murs au lieu de les salir », soutient Patrick. L’ancien élève du collège Hadem est toutefois conscient des clichés qui gravitent autour des graffitis. « Mais, ils finiront par comprendre et par l’accepter à force d’exposer ces dessins un peu partout », affirme-t-il.
Tchooko encourage les potentiels graffeurs à s’instruire d’abord, car, selon lui, il n’y a pas de graffiti qui tienne sans un message fort. « Tout graffiti doit être porteur de message. Sinon ce serait tout simplement se réduire à faire de l’art pour l’art », conclut-il.
Sindy Ducrépin


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