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Ernest Cline, auteur de « Ready Player One » :

« J’ai grandi à l’époque parfaite »

mercredi 28 mars 2018 par Charles

Le film de Steven Spielberg, en salles ce mercredi 28 mars, est inspiré du roman éponyme de cet auteur américain qui révère la pop culture des années 1980 et se qualifie volontiers de « geek ».

« Quand j’ai écrit Ready Player One, j’ai admis dès le départ que cela ne deviendrait pas un film car c’était un pêle-mêle de références de pop culture que j’aimais : Atari, Pac Man, Godzilla, Duran Duran… Et au cinéma, il faut payer des droits. A vrai dire, c’était mon premier roman et je ne l’ai même pas écrit en pensant être publié. » Doublement perdu. Non seulement le récit de science-fiction d’Ernest Cline est devenu un best-seller à sa sortie en 2011, mais il a ensuite fait l’objet d’une adaptation sur grand écran par Steven Spielberg lui-même, qui arrivera en salles le 28 mars. La première mondiale du film a eu lieu au festival South by Southwest (SXSW) d’Austin (Texas), dimanche 11 mars.
Un happy end qui ne manque pas de charme : cet auteur geek – il préfère dire « enthousiaste » –, a été biberonné aux films Amblin, la société de production de Steven Spielberg. A l’image des héros des Goonies ou de la bande de Stranger Things, il raconte son enfance dans l’Ohio des années 1980 occupée par les jeux vidéo et les aventures entre copains. « J’ai grandi à l’époque parfaite, je fais partie de la première génération d’enfants à avoir eu un ordinateur et une console à la maison. Il y avait tant de films déterminants destinés aux jeunes et Star Wars m’a ouvert au monde de la science-fiction », a-t-il expliqué lors d’une conférence au festival d’Austin, sa ville de résidence.
« Ces nouvelles technologies inquiétaient mes parents. Ils disaient “les jeux vidéos vont te pourrir le cerveau”. Tu n’iras nulle part si tu continues à jouer. J’aimerais qu’ils soient encore là pour voir comment cela a tourné. »
Œufs de Pâques

Dans sa dystopie, qui se déroule en 2044, l’auteur présente un magnat excentrique multimilliardaire qui a créé un univers de réalité virtuelle, l’Oasis, permettant aux utilisateurs d’échapper à un monde en crise économique et écologique. Lorsque ce personnage meurt, il laisse un message : quiconque trouvera l’« easter egg » (un œuf de Pâques, qui désigne dans les jeux vidéo une fonction cachée) qu’il a inséré dans son jeu héritera de sa fortune. Un adolescent, Wade Wyatt, part à sa recherche.

« Au début des années 1980, j’ai trouvé un easter egg dans le jeu Adventure d’Atari. Cela m’a profondément influencé et cela a nourri mon imagination », explique le romancier, qui estime avoir appris à raconter des histoires en jouant plus jeune au jeu de rôle Donjons et Dragons.
Ernest Cline a aussi été invité par Steven Spielberg à travailler comme scénariste sur l’adaptation de son livre, lui permettant de se réconcilier avec l’industrie du cinéma après un épisode difficile. « Au début des années 2000, j’ai commencé à écrire le script d’un film indépendant, Fanboys, dans lequel j’ai mis beaucoup de choses personnelles. » Cette histoire d’un ado en phase terminale, fan de Star Wars, dont les amis vont tenter de pénétrer chez George Lucas pour voir l’épisode 1 avant sa sortie en salles, a fini par intéresser des producteurs. « Et c’est la partie la plus triste de Fanboys : il a fini dans les mains des pires personnes d’Hollywood : Kevin Spacey était producteur, Harvey Weinstein aussi… » Ricanements dans la salle du festival SXSW. L’auteur précise : « Ils ont fait tout ce qu’ils ont pu pour ruiner le film. Ils l’ont vidé des éléments essentiels, puis ils l’ont confié à un autre réalisateur. » Le long-métrage ne rencontrera pas le succès. C’est ce déchirement qui l’a conduit à écrire Ready Player One.
« Je ne voulais plus être scénariste et perdre le contrôle de mes créations. Avec le roman, il n’y a rien qui s’immisce entre toi et ton public. »
« Se balader dans son livre »

Ernest Cline et les acteurs Tye Sheridan and Ben Mendelsohn, assis sur la DeLorean du romancier lors de la première mondiale de « Ready Player One » au festival South by Southwest d’Austin, Texas. Jack Plunkett / Jack Plunkett/Invision/AP
Avec l’adaptation en film, l’écrivain ne pense pas toutefois avoir perdu le contrôle sur Ready Player One, bien que des scènes ont dû être réinterprétées pour des raisons cinématographiques. « Steven Spielberg m’a fait me sentir comme un collaborateur à part entière », assure l’auteur. Il s’est pourtant senti tout petit le jour de leur rencontre. « J’avais été chez le coiffeur, ma tenue était calculée avec soin, j’étais nerveux et les mots ne me venaient pas. Et là je me suis dit que, depuis trente ans, tous les gens qui ont dû le rencontrer devaient se comporter ainsi. Le pauvre gars devait se retrouver systématiquement devant des gens qui bafouillent. Et lui, il arrive simplement, avec décontraction. »
Mais c’est avant tout sur le plateau du tournage à Londres que le romancier a réalisé qu’il ne s’agissait plus d’un rêve de gosse, mais d’une affaire bien concrète. « Jusqu’à présent les décors, les vêtements n’existaient que dans ma tête. Et là les techniciens avaient tout construit d’après mes écrits. J’étais littéralement en train de me balader dans mon livre. »


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