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La Minustah est mal partie, la Minujusth commence mal

vendredi 27 octobre 2017

Comme pour nous redire que quelque chose ne tourne pas rond dans le monde de la justice, après quatre mois d’arrêts de travail et de grèves sporadiques, aucune autorité n’a tenté de prendre le leadership pour rassurer le monde de la justice ou pour rappeler avocats, huissiers, greffiers et juges à leur obligation de rendre justice en dépit de tout.

Editorial -
Il n’y a pas de médecin au chevet de nos hommes de loi. C’est dommage.
Comme pour nous redire que le travail ne fait que commencer pour avoir des forces de police digne de protéger et de servir, ces derniers jours, les réseaux sociaux ont rapporté les excès d’agents de la PNH qui ont agi en représailles après la mort d’un des leurs, des excès de policiers qui ont intimidé une dame et deux enfants dans une voiture et la énième évasion de prisonniers, cette fois de la fameuse prison de Petit-Goâve, réputée pour son surpeuplement. C’est dommage que notre police alimente les critiques.
Pour la justice, ou pour la Police, on ne sait pas si les autorités constituées se parlent, se concertent, se respectent, s’apprécient, travaillent pour nous servir. Des informations qui circulent laissent croire que l’harmonie ne règne ni dans la justice, ni dans la police, ni entre la justice et la police, ni entre le gouvernement, la justice et la police. C’est dommage.
C’est dans ce climat que la Mission des Nations unies pour l’appui à la justice en Haïti (MINUJUSTH) s’installe dans nos murs. La cérémonie officielle s’est déroulée entourée de deux anges aux mines patibulaires : le dernier discours de l’ambassadeur d’Haïti à l’ONU et les dernières déclarations du sénateur Youri Latortue. Les deux réclament soit un changement de statut pour la nouvelle mission, soit un droit de regard sur les attributions de la Minujusth. C’est dommage, leurs demandes arrivent bien tard.
Ce lundi 16 octobre, comme pour souligner le malaise, ni le président de la République, ni le président du Conseil supérieur du pouvoir judiciaire (CSPJ), ni le Premier ministre, président du Conseil supérieur de la police nationale (CSPN), ni le ministre de la Justice et de la Sécurité publique, ni les présidents des deux branches du Parlement, ni le directeur général de la Police nationale n’ont cru nécessaire de payer de leur présence à la cérémonie d’entrée en fonction de la MINUJUSTH. Des absences très remarquées.
Dans le même temps, l’ambassade des États-Unis en tête, les pays amis d’Haïti ont salué, chacun à sa manière, l’arrivée de la nouvelle mission.
Cet antagonisme soft entre la position haïtienne et celle de la communauté internationale sur une mission d’assistance à Haïti se renouvelle à chaque déploiement d’un équipe d’observateurs, de policiers ou de militaires dans le pays. Toutes les petites et grandes missions des Nations unies en Haïti depuis 1990 (ONUVEH, MICIVIH, MINUHA, MINUH, MANUH, MITNUH, MIPONUH, MINUSTAH) ont reçu leur douche froide d’une partie des autorités ou de la population tout en alimentant des espérances de changement dans d’autres couches. La MINUJUSTH n’échappe pas à la règle.
Encore une fois, une mission nous arrive parce que nous n’avons pas fait nos devoirs. Nous n’avons pas fait jouer à temps la diplomatie pour avoir une mission à la mesure de nos problèmes. Nous avons laissé d’autres choisir pour nous. Et comme un enfant qui reçoit le jouet non souhaité à Noël, nous rechignons, nous bougonnons (oui, le verbe bougonner existe en français et signifie la même chose qu’en créole), nous boudons. Nous nous apprêtons à perdre la proie pour courir après l’ombre.
Les problèmes de la justice et de la police sont réels. Notre insatisfaction aussi devant toutes les missions passées et à venir. La Minustah est mal partie en nous laissant des problèmes insolubles et particulièrement le choléra. La Minujusth commence mal et c’est dommage.

Frantz Duval
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