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Sans le nom de Dany Laferrière, la bibliothèque de Petit-Goâve finalement inaugurée

mercredi 4 octobre 2017

Le ministre de la Culture, Limond Toussaint, accompagné de la nouvelle directrice de la Bibliothèque nationale, Franceline Cadet Robas, a finalement inauguré, le jeudi 28 septembre, la Bibliothèque municipale de Petit-Goâve, en lieu et place de « Bibliothèque nationale Dany Laferrière ».

National -

Les responsables du projet ont voulu l’appeler « Bibliothèque nationale Dany Laferrière ». C’était même écrit sur la façade du bâtiment, une façon de rendre hommage à l’écrivain Dany Laferrière, académicien, fils de Petit-Goâve. Mais ce n’était pas le souhait de tout le monde. En guise de protestation, un groupe de personnes, connues de la commune, ont, à l’aide d’une échelle, au vu de tout le monde, effacé le nom de Dany Laferrière sur l’immeuble. Comme un affront à ce dernier. Mais, pour assumer leur geste, les contestataires ont brandi la Constitution haïtienne qui interdit aux institutions publiques de porter le nom des personnalités encore vivantes, histoire d’éviter le culte de la personnalité. Des Petits-Goâviens y voient plutôt une main politique…
Rencontré, il y a quelques jours, devant la bibliothèque avec le nom de Dany Laferrière masqué sous une couche de peinture, un homme, casquette vissée sur la tête, n’a pas trop compris la situation. Lui expliquant la raison pour laquelle le nom de l’académicien était effacé, ce quinquagénaire, « fils de Petit-Goâve », a demandé si ce « Dany Laferrière était mort »…
De son côté, Sherlyne n’a pas voulu trop commenter. « J’ignore les raisons qui ont poussé les gens à effacer le nom de l’écrivain [Dany Laferrière], a-t-elle dit. Par contre, s’ils se sont appuyé sur la Constitution pour le faire, j’estime qu’ils ont raison. »
Jean Daniel frôle, lui, la quarantaine. Il n’est pas content que le nom de l’académicien soit enlevé du bâtiment. « S’il existait un problème, ce ne serait en aucun cas un problème de nom, a-t-il grondé. Dany Laferrière est un grand écrivain qui a plein de projets pour la bibliothèque. Je crois plutôt que les gens qui ont commis cet acte éprouvent de la rancœur. On est habitué suivant nos coutumes à ne pas honorer les gens de leur vivant. Mais, pour Dany, pour ses contributions, c’est mieux de lui rendre hommage avant qu’il parte. C’est une décision politique », a ajouté Jean Daniel.
Pour Wilson, « la Constitution a commis une erreur en interdisant d’honorer les gens de leur vivant ». « C’est une mauvaise idée, si l’on tient compte toutefois de ce que Dany représente sur la scène internationale, a-t-il avancé. Je souhaite seulement que cette décision d’enlever le nom de Dany de la bibliothèque n’ait rien à voir avec la politique. Je voudrais que les parlementaires modifient cette loi. »
Pendant l’inauguration sans faste, certaines questions n’ont pas été soulevées. Le ministre de la Culture et de la Communication, Limond Toussaint, présent à l’inauguration, a inscrit cette réalisation « dans le cadre de l’importance accordée par le pouvoir en place à l’accès aux livres, à l’information au sein de la population juvénile ». « Cette œuvre témoigne du souci du gouvernement pour l’avancement de la culture et l’émancipation de la jeunesse », a déclaré le ministre avec un brin de propagande.

De son côté, la directrice générale de la Bibliothèque nationale d’Haïti, Franceline Cadet Robas, épouse du député Cayes/Ile-à-Vache récemment nommée à ce poste –, a remercié les bailleurs, notamment l’Union européenne, et le lycée Faustin Soulouque qui a hébergé ce qui restait de cette bibliothèque détruite lors du séisme du 12 janvier 2010. Franceline Cadet Robas exhorte les jeunes à faire de cet endroit une priorité et à le protéger contre tout acte de vandalisme.
Alors que certains le pointent du doigt comme étant la principale personne qui refuse que la bibliothèque porte le nom de son cousin Dany Laferrière, le maire de Petit-Goâve, Samson Limonjy Jean, a brillé par son absence à la cérémonie d’inauguration. Il s’est toutefois fait représenter par l’un de ses assesseurs.
La bibliothèque est construite en deux niveaux sur une parcelle de 230 mètres carrés. Elle est financée à hauteur de 287 000 euros par l’Union européenne et l’ONG Welthungerhilfe( Agro Action Allemande), dans le cadre du Projet intégré d’aménagement et développement urbain à Petit-Goâve lancé en 2013.

Valéry Daudier
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