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La gourmandise est mon péché mignon… Bloc-notes

mercredi 20 septembre 2017

Un sénateur sur une station de radio : Si vous voulez donner 80% au ministère de la Santé, vous n’avez qu’à gagner les prochaines élections ». Mais le brave sénateur n’a pas pensé à dire pourquoi le budget est réparti comme il l’est. Un député furieux après la police : Qu’est-ce qu’il aurait voulu, que cette institution massacre à volonté grévistes et manifestants ?

National -

On pourrait rire de ceux qui, lors de la campagne électorale, animés par leurs vieux réflexes d’exclusion, accusaient tel ou tel autre candidat d’être entouré d’incompétents. Ni cet exécutif, ni ce Parlement n’ont trouvé une voix crédible pour convaincre qui que ce soit de l’intelligence et de l’équité de ce budget de la gourmandise, conçu et réparti comme un gâteau à partager entre deux pouvoirs. Ce gouvernement et cette majorité parlementaire ne semblent même pas disposer des services d’un économiste ou d’un sociologue digne de ce nom… D’où le recours à la menace, à la violence verbale et aux fanfaronnades.
Népotisme, incompétence (certaines nominations prouvent que pour cet exécutif et sa majorité parlementaire, la compétence n’est pas une vertu, certaines nominations équivalent à avilir la République), réseautage. Jamais en si peu de temps un pouvoir n’aura autant déçu. Mais, reconnaissons-le, il n’aura déçu que ceux qui avaient voulu y croire. A ceux-là, on pourrait dire : mwen te pale w.
La tentation sera grande de vouloir réprimer. Ce serait folie. L’exécutif et sa majorité parlementaire, et l’inféodation forcée de la police et du système judiciaire, toutes les avenues, tous les canaux sont bouchés. Quand on a tout le pouvoir institutionnel, il faut s’attendre à ce que la rue devienne le terrain privilégié d’expression du mécontentement et des discours revendicatifs. Combien de temps pourra durer un affrontement entre une population de plus en plus mécontente et véhémente et un exécutif et une majorité parlementaire ne jouissant d’aucune base populaire ?
Le maintien de ce budget de la gourmandise, ban m m a ba ou, gato a pou nou de, est une déclaration de guerre à la population. L’exécutif et sa majorité parlementaire ont-ils les armes pour la livrer et combien de temps pourront-ils tenir le siège d’une population s’estimant dans ses droits ? Lorsque les discours revendicatifs s’expriment par des demandes minimalistes (le retrait de ce budget ne serait pas la fin du monde) et que les pouvoirs refusent d‘en tenir compte, ces pouvoirs ouvrent la porte à l’escalade. Les revendications ne peuvent faire que se maintenir et en se radicalisant. Jusqu’ici, les propos du président, de ses porte-parole, des parlementaires de sa majorité vont dans le sens du mépris : chef je suis, je fais ce que je veux. S’engager sur cette voie, c’est aller vers les crimes de sang. Avec quels moyens ? D’autant que les alliances et supports vont commencer à s’effriter ? Tels entrepreneurs doivent se dire : si les choses se gâtent vraiment, n’allons-nous pas tout perdre ? Tels « élus » doivent se dire : ne serai-je pas l’une des premières cibles si le peuple laisse vraiment éclater sa colère ?
Le choix est entre le recul ou la folie de la répression et l’escalade. Si la gourmandise est un péché mignon, il arrive aussi qu’on sanctionne les gloutons.

Antoine Lyonel Trouillot
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