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Comment éradiquer l’État islamique ?

vendredi 22 août 2014

Barack Obama a fait de la lutte contre l’EI une priorité, mais les frappes aériennes risquent de vite montrer leurs limites. Jusqu’où iront les États-Unis ?

Barack Obama choisit toujours ses mots avec attention. En décrivant l’État islamique comme un groupe "qui n’a pas sa place au XXIe siècle", le président américain fait de la lutte contre ces djihadistes ultra-radicaux une priorité. Reste la question délicate de sa stratégie militaire en Irak. Depuis l’île de Martha’s Vineyard (nord-est), son lieu de vacances estivales, le président américain l’a affirmé avec force : la décapitation du journaliste américain James Foley par l’EI, qui "choque la conscience du monde entier", ne fait que renforcer la détermination des États-Unis à lutter contre "ce type d’idéologies nihilistes". Depuis plusieurs jours déjà, il assurait que la lutte contre l’EI, qui a conquis, depuis juin, des pans entiers du territoire irakien, se jouerait sur le long terme et que les frappes aériennes n’étaient limitées par aucun calendrier précis.
Les frappes de moins en moins efficaces

Pour Stephen Biddle, spécialiste des questions de défense au sein du Council on Foreign Relations, le succès des frappes initiales, deux ans et demi après le retrait des troupes américaines d’Irak, ne doit cependant pas masquer les difficultés à venir. "Dans ce type de guerre, les premières frappes ont toujours un effet immédiat, car elles permettent de détruire des cibles pas ou peu protégées", souligne-t-il. Mais une fois que les combattants s’adaptent, dispersent leurs équipements militaires et se mélangent à la population civile, la donne change profondément. "Cela ne signifie pas que les frappes deviennent inutiles, mais elles sont de moins en moins efficaces", explique-t-il à l’AFP, mettant en avant la nécessité d’une stratégie militaire et politique à moyen terme.

Si le Pentagone répète à l’envi que les objectifs sont clairement délimités, leur définition - aide humanitaire et protection des installations américaines et des Américains - laisse une marge d’interprétation importante. Ainsi, les militaires américains ont justifié les frappes menées pendant plusieurs jours aux abords du barrage de Mossoul par le risque qu’une éventuelle explosion du barrage aurait fait courir aux populations civiles en aval, potentiellement jusqu’à Bagdad. Reste, près de deux semaines après la première frappe dans le nord de l’Irak, nombre d’interrogations sur la portée et l’ampleur des actions militaires américaines dans les semaines et les mois à venir.

Les troupes au sol sont exclues

"La grande question est : jusqu’où le président Obama ira-t-il ?" résume Max Boot, du Council on Foreign Relations dans le magazine Commentary. "Au-delà de la protection des Yazidis et de la reprise du barrage de Mossoul, nous avons besoin d’une stratégie pour annihiler l’EI", ajoute cet historien spécialisé dans les questions militaires, qui plaide pour l’envoi de 10 000 soldats et conseillers militaires et le renforcement significatif des frappes aériennes. Un déploiement d’une telle ampleur n’est, pour l’heure, pas à l’ordre du jour à Washington, où l’on rappelle inlassablement que l’envoi de troupes de combats au sol est exclu.

Selon un responsable américain, le Pentagone envisage d’envoyer quelque 300 soldats supplémentaires en Irak, ce qui porterait à environ 1 150 le nombre de soldats et de conseillers militaires présents dans le pays pour, en particulier, protéger les installations diplomatiques américaines.

Il faut "frapper beaucoup plus fort" (McCain)

Sur la scène politique américaine, la diffusion de la vidéo de l’exécution de James Foley a renforcé nombre de républicains dans leur conviction que si la réponse de M. Obama est justifiée, elle reste beaucoup trop timorée. Pour le sénateur républicain John McCain, il est temps, devant "l’organisation terroriste la plus brutale jamais vue", de frapper beaucoup plus fort. "Le président a ignoré la menace pendant longtemps et aujourd’hui nous en payons le prix", a-t-il déclaré dans The Arizona Republic. "Plus [Obama] attend, plus l’EI s’adapte et plus ce sera difficile", estime l’ancien candidat à la Maison-Blanche qui juge désormais incontournable d’attaquer l’EI également en Syrie. "Ils ont effacé la frontière entre l’Irak et la Syrie", rappelle-t-il.

D’autant que Washington souligne à l’envi les résultats encourageants obtenus, en collaboration étroite avec les forces kurdes, après un peu plus de dix jours de frappes et les premiers revers infligés à l’EI, comme la reprise du barrage de Mossoul. "L’EI a des forces et des faiblesses", soulignait mardi le contre-amiral John Kirby, porte-parole du Pentagone. "Ils sont puissants, ils ont des ressources. Ils sont assez bien organisés pour un réseau terroriste. Mais ils ne sont pas non plus des géants, comme nous l’avons vu. À travers ces frappes, ils ont été atteints. Leurs capacités ont été endommagées. Et donc ils ne sont pas invincibles."


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