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Documentaire/Migration « Destination Brésil », le coup de maître de Valéry Numa

mercredi 21 septembre 2016

Au Collège Marie-Anne, une salve d’applaudissements a salué, ce vendredi 16 septembre 2016, la fin de la projection du documentaire « Destination Brésil » réalisé par le journaliste de la Radio Vision 2000, Valéry Numa. Koralie, Laetitia et Norame, âgées de 16 ans, bientôt 17, élèves de première, sont de celles qui ont applaudi à tout rompre.

Pour elles, il s’agissait d’abord de récompenser le travail fourni par le journaliste qui a dû passer deux semaines au Brésil dans le cadre de cette réalisation.

À travers ce documentaire, le journaliste vedette du « talk-show » Vision 2000 à l’écoute donne un coup de balai original à l’histoire de la migration d’Haïti. Il a de fait immortalisé, grâce à la magie du petit écran, l’irrésistible envie ou le besoin forcé, cela dépend, de voyage des Haïtiens. Depuis toujours, l’histoire des Haïtiens a été une histoire de partance. Au fil des ans, les motifs ont quelque peu varié mais nos compatriotes n’ont pas cessé de prendre le large pour autant. Entre la fuite d’une dictature, l’abandon de sa progéniture par une mère ou un père de famille pour aller chercher meilleure fortune ailleurs ou encore le départ contraint du fils ou de la fille, espoir de la famille, pour aller poursuivre une carrière universitaire, Haïti continue d’envoyer des cerveaux et des bras aux quatre coins du monde. Comme on enverrait des bouteilles à la mer. Avec espoir ou non qu’un jour elles reviennent.

Scotché à l’actualité de ces derniers mois, Valéry Numa, autant journaliste que documentaliste, si ce n’est le premier, à bien des égards, qui prend le dessus sur le second, a opté pour le Brésil. Récente terre d’accueil pour les migrants haïtiens qui, au lendemain du tremblement de terre, se sont voués à l’hospitalité brésilienne telle une bouée de sauvetage. En promenant sa caméra un peu partout au pays de la samba, Valéry Numa nous livre des témoignages poignants sur le vécu, l’adaptation, l’intégration, le mal-être, la nostalgie des ressortissants haïtiens. Ces derniers racontent eux-mêmes, sans langue de bois, leur infortune, leurs déconvenues. Avec leurs propres mots, crus parfois.

« C’est triste la situation dans laquelle évolue ces Haïtiens au Brésil […] Avant, nous n’avions aucune idée de ce qu’ils enduraient », a reconnu Koralie, le regard pétillant, émue sans doute par les images qui viennent de défiler. Laetitia et Norame se disent conscientisées par le documentaire qui dure une heure 48 minutes. Pendant un temps, on aurait pu penser que les filles allaient décrocher. Mais non. Elles sont restées attentives, sérieuses durant toute la projection. Ce qui n’a pas empêché de temps à autre qu’un éclat de rire fuse par-ci, par-là dans l’assistance. De quoi nous rappeler qu’on se trouve en présence d’élèves du secondaire qui n’ont rien perdu de leur espièglerie.

Pourtant, ces éclats de rire sporadiques ne sont en rien assimilables à de l’insensibilité au sort de nos compatriotes qui habitent les favelas et qui sont victimes par moments, d’actes de criminalité, de préjugés et de racisme. Certains d’entre eux se disent prêts à retourner dans la mère patrie. D’autres, plus hardis, pour fuir notamment une économie brésilienne en récession, ont donc mis le cap sur les États-Unis d’Amérique en parcourant une bonne partie de l’Amérique du Sud et aussi de l’Amérique centrale.

« Destination Brésil » retrace aussi le récit de l’échec de la représentation diplomatique bancale d’Haïti au Brésil. L’ambassade d’Haïti au Brésil ne dispose même pas d’un site web pour maintenir le contact avec nous et nous informer, se plaint un ressortissant. Très vite, elle s’est retrouvée submergée par le flux de migrants qui ont commencé à fouler le sol brésilien après le séisme. Et pour cause, depuis 2012, 90 000 Haïtiens sont arrivés au pays de la samba.

Pour la promotion de son documentaire, Valéry Numa aura sans doute à réaliser d’autres projections un peu partout à travers le pays. Il aura à conquérir d’autres publics, d’autres audiences. Comme c’était le cas au Collège Marie-Anne ce vendredi où les filles ont découvert pour la première fois les misères des migrants haïtiens. Après avoir visionné la projection, Koralie, Laetitia et Norame promettent, à l’avenir, de mieux planifier leurs voyages. Elles partiront pour leurs études universitaires. Ensuite, elles reviendront au pays, ont-elles promis.

AUTEUR

Patrick Saint-Pré

sppatrick@lenouvelliste.com


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