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Franz Beckenbauer, un "bénévole" à 5,5 millions d’euros

lundi 19 septembre 2016

Le kaiser, qui avait toujours affirmé avoir travaillé gracieusement pour le Mondial 2006 en Allemagne, aurait en réalité touché 5,5 millions d’euros.

Par Frédéric Therin, à Munich

Le « bénévolat » peut rapporter gros, très gros. Franz Beckenbauer a juré pendant des années qu’il n’avait pas reçu un centime lors de sa présidence du comité d’organisation de la Coupe du monde 2006. L’ancien libero et fils de postier avait accepté de travailler gratuitement pendant de nombreux mois pour aider son pays à accueillir le Mondial. Un audit de la fédération allemande de football (DFB) vient toutefois d’affirmer le contraire. Selon Der Spiegel , le kaiser a en effet reçu 5,5 millions d’euros pour un travail effectué pour l’un des sponsors de la Coupe du monde en Allemagne, la société de paris Oddset.

Ce rapport affirme que l’entregent de Beckenbauer avait permis à la DFB d’attirer Oddset comme l’un des six sponsors majeurs de la Coupe du monde. Pour son travail, Franz Beckenbauer a été payé en cinq fois entre 2005 et 2006, par la fédération allemande, et non pas directement par la société de paris. La DFB n’a, elle, versé aucune taxe jusqu’en 2010, lorsqu’elle s’est acquittée d’un montant de 1 million d’euros que lui a remboursé un an plus tard le vainqueur de la Coupe du Monde en 1974, qui est un des deux seuls anciens joueurs avec le Brésilien Mario Zagallo à avoir aussi remporté ce trophée en tant qu’entraîneur.

Le kaiser « n’est plus intouchable »

Ces révélations sont un nouveau coup dur pour l’ancien footballeur, qui est actuellement hospitalisé après avoir subi un pontage aorto-coronarien, le 3 septembre, dans une clinique du sud de l’Allemagne. Le double vainqueur du Ballon d’or est inculpé depuis le 1er septembre par la justice suisse pour gestion déloyale et blanchiment d’argent. L’ex-président du Bayern Munich n’est pas le seul à être poursuivi. L’ancien président de la DFB Wolfgang Niersbach, son prédécesseur Theo Zwanziger et son ancien secrétaire général Horst Schmidt sont aussi les cibles de cette enquête. En octobre 2015, l’hebdomadaire Der Spiegel avait affirmé que l’Allemagne aurait utilisé un fonds secret de 10 millions de francs suisses (6,7 millions d’euros) pour acheter des voix et obtenir l’organisation du Mondial 2006. Ce fonds aurait été alimenté, à la demande de Franz Beckenbauer, par l’ancien patron d’Adidas, aujourd’hui décédé, Robert Louis-Dreyfus, peu avant l’été 2000, période à laquelle s’est faite l’attribution de la Coupe du monde que l’Allemagne a remportée d’une courte tête (12 voix contre 11), aux dépens de l’Afrique du Sud.

D’autres « deals » assez douteux avaient aussi précédé ce vote. Une semaine
avant le scrutin, le chancelier Gerhard Schröder avait levé un embargo contre les ventes d’armements vers l’Arabie saoudite. DaimlerChrysler avait, quant à lui, signé un juteux contrat avec Hyundai, un groupe dont l’un des fils du fondateur siégeait au comité exécutif de la Fifa. Volkswagen et Bayer avaient, pour leur part, annoncé des investissements en Thaïlande et en Corée du Sud, deux pays qui pouvaient voter en faveur de l’Allemagne.

Franz Beckenbauer était parvenu jusqu’à maintenant à ne pas être éclaboussé par ces nouvelles pour le moins compromettantes. Mais le kaiser « n’est plus intouchable » aujourd’hui, juge le quotidien Frankfurter Allgemeine Zeitung. Le nouveau président de la DFB, Reinhard Grindel, vient ainsi de se désolidariser de l’ancien capitaine de la Mannschaft aux 103 sélections en équipe nationale. « Nous savions que Franz Beckenbauer avait travaillé pour Oddset lors de la Coupe du monde 2006, a-t-il expliqué. Nous ne savions pas qu’il avait reçu la somme remarquable de 5,5 millions d’euros sur le pot du comité d’organisation. Dans ce contexte, on ne peut certainement pas prétendre que ses activités au sein du comité d’organisation étaient effectuées sur une base de volontariat. Cela prouve que le comité d’organisation de la Coupe du monde a cherché à dissimuler certaines choses. Ce manque de transparence a trompé en partie le grand public, et je condamne cela. » Les oreilles de Franz Beckenbauer ont dû siffler en entendant ces quelques mots…


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