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Loi de Ffinances

Avec moins de 2 milliards de budget, adieu les ODD ! -

mercredi 27 juillet 2016

« Avec un budget aussi maigre que les 121,95 milliards de gourdes prévues dans l’exercice 2016-2017, et un taux de croissance du PIB de 2,2 %, comment Haïti pourrait-elle respecter ses promesses d’enrayer la pauvreté à l’horizon 2030 ? »

Du moins c’est l’interrogation qui revient en filigrane au moment où l’Observatoire du système financier haïtien (OFSH) et le Group Croissance ont présenté, le mardi 26 juillet 2016, les allocations budgétaires de l’exercice fiscal 2016-2017.

Avec des investissements aussi bas dans la santé (5,51 milliards), l’environnement (608 millions) et l’agriculture (7 milliards), la pauvreté a encore un terreau fertile dans le pays. La croissance prévue dans le budget est 2,2%. « Pour enrayer ou tout au moins réduire significativement la pauvreté à l’horizon 2030, Haïti devrait afficher un taux de croissance annuelle du PIB de 10%. Avec une prévision aussi pessimiste, faible, mais réaliste, Haïti ne pourra pas atteindre les objectifs de développement durable », a expliqué Kesner Pharel dans une conférence de presse. Il a rappelé qu’Haïti n’a jamais atteint ses prévisions de croissance durant les 10 dernières années.

Pendant que la population augmente, il y a plus de bouches à nourrir, les ressources budgétaires stagnent. « En considérant le taux de change, les montants alloués au budget 2016-2017 sont inférieurs comparés à ceux de l’année dernière », a fait remarquer l’économiste Kesner Pharel, P.D.G. du Group Croissance. Il a rappelé qu’en octobre dernier, le dollar s’échangeait contre environ 55 gourdes. Maintenant il faut plus de 64 gourdes pour un dollar. C’est moins de deux milliards de budget pour un pays qui a tant besoin d’investissements.

Le secteur économique disposera d’une enveloppe de 43,18 milliards, soit 35,4 % du budget total ; le secteur social aura 29 milliards, soit 23,8% ; la politique aura 19,06 milliards, soit 15,6% ; le pouvoir législatif disposera de 3,91 milliards et le pouvoir judiciaire aura à sa disposition 1,06 milliard de gourdes, soit 0,9% ; et les institutions indépendantes auront 3,28 milliards de gourdes, soit 2,7% du budget total de la nation.

Pour le deuxième exercice consécutif, la plus grande part du gâteau budgétaire est accordée au ministère de l’Éducation nationale et de la Formation professionnelle avec ses 21, 22 milliards de gourdes (17, 4% du total), suivent les ministères des Travaux publics, Transports et Communications avec 18,29 milliards (15,00%), de l’Économie et des Finances, 8,33 milliards de gourdes (6,80 %). La Primature aura une enveloppe de 1,82 milliard (1,5%) et la présidence 1,20 milliard de gourdes (1.00 %) entre octobre 2016 et septembre 2017.

Depuis l’année dernière les ressources internes représentent une grande part dans la loi de finances. Cette année les ressources nationales vont contribuer jusqu’à 60 % dans le budget. Les dons prévus du gouvernement sont de 30,6 milliards de dons, soit 25 %, a précisé Pharel. Le reste, dit-il, doit être financé de deux manières, externe ou interne. Le gouvernement table sur 4,9 milliards de gourdes provenant des fonds PetroCaribe qui a substantiellement baissé en raison des prix du pétrole sur le marché mondial et la crise au Venezuela. Et enfin, les bons du Trésor constituent une autre source de financement interne.

Les dépenses courantes totalisent 63 milliards et les 59 milliards de gourdes seront consacrées aux investissements suivant les prévisions des autorités gouvernementales. Tout compte fait, les dépenses courantes dépassent nettement les investissements. Sont attendus dans ce budget, 60 % des ressources fiscales et douanières, 30 % de dons internationaux… et autres financements. Sur les 30 milliards de dons octroyés à Haïti, seulement trois milliards passent directement par le gouvernement ; la plus grande part sera décidée par l’international.
À titre de comparaison, la Jamaïque, qui a moins de trois millions d’habitants, dispose d’un budget de cinq milliards de dollars américains ; la République dominicaine a un budget de plus de 10 milliards de dollars pour une population de près de 10 millions d’habitants. Haïti va dépenser moins de deux milliards de dollars pour ses plus de 10 millions d’âmes.

Et qui pis est, le secteur agricole sera contracté de 1%, une situation qui peut décourager les potentiels investisseurs dans ce secteur clé pour Haïti. Rare, l’année dernière l’agriculture, qui représentait traditionnellement 25 % du PIB, n’affichait que 20%. À ce rythme on risque de voir le secteur agricole enregistrer des baisses de performances dans ce secteur. Le commerce devrait croître à 1%, l’industrie à 0,2% et la construction à 0,3%. L’inflation devrait se situer autour de 10% suivant les prévisions de la loi de finances. On devrait se retrouver avec un taux de 13,5 % en septembre 2017.

Le gouvernement en place a déposé au Parlement deux lois de finances en l’espace d’un trimestre. Députés et sénateurs ne se sont pas prononcés sur ces lois. Le budget du prochain exercice affiche presque les mêmes chiffres que celui de l’exercice en cours (qui prendra fin le 30 septembre 2016) autour de 122 milliards de gourdes. L’administration Martelly-Paul avait rectifié en diminuant le budget 2015-2016 de 9 milliards de gourdes.

AUTEUR

Dieudonné Joachim

djoachim@lenouvelliste.com
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