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’’Les braises de l’enfer du paradis’’ avec Agénor Cadet Livres en folie

jeudi 26 mai 2016

Dans le sillage de l’œuvre de Pierre Josué Agénor Cadet, qui titre après titre compose un formidable répertoire destiné aux jeunes lecteurs, à en juger par le rythme et le volume de sa production (articles, nouvelles, poésies, romans, essais…), l’auteur versatile n’a sans doute jamais éprouvé l’angoisse de la page blanche ni les absences instantanées de la Muse Polymnie.

Il s’agit cette fois de braquer le projecteur littéraire sur une nouvelle gâterie oxymorique qui n’est plus que prétexte à commentaire : DANS L’ENFER DU PARADIS. Ce titre associe froidement deux univers parallèles dans « un espace qui semblait avoir été la Perle de la région caribéenne ». Étrange duplicité qui est la caractéristique de cette œuvre trompeuse dont les grâces sont autant de leurres. Mais des leurres efficaces, qui prennent à leurs charmes le lecteur candide et ne le fait sourire de nos haïtienneries que pour mieux le piéger et le guérir de sa cécité.

L’auteur réussit sa gageure à travers les existences à peine ébauchées de sa fiction (Déblaya – Ti Blanc mazora – Suicide du sénateur Banban – Le choc d’Alissa – Le sort jeté au docteur Frivolus – Les confidences d’un ex chef d’Etat…) Il dévoile la souffrance de vivre dans cet enfer paradisiaque où la bêtise a ses lettres de noblesse et ses formes authentiques et à maîtriser les méandres d’un malaise social incommensurable. Pas de fioritures. Ni déguisements. Ni restrictions.

Josué Agénor Cadet a pointé partout où elle se loge la bêtise gluante, collante, généralisée, conquérantes… On s’y empêtre. On se laisse mener, gouverner par elle, et on ne s’en sort plus.

Tous les événements que l’écrivain nous retrace (Le professeur ou le fou – La vengeance de Grannn Tiza…), les personnages qu’il décrits, les situations cocasses qu’il relate sont bien réels. Mais au fond, ils ne sont pour l’auteur que des prétextes : « Toute ressemblance avec des êtres vivants ou ayant réellement existé ne saurait être que pure coïncidence », assume-t-il.

C’est que Pierre Josué Agénor Cadet ne vise pas l’objectivité mais la vérité. Et de ce fait, je pense qu’on a rarement dit aussi vrai. Il dépeint un univers sans concessions, empreint d’une violence propre à nos conditions de vie de peuple. Dans cet enfer du paradis, au milieu de ce coin de terre élémentaire, les femmes sont des victimes désignées mais pas toujours résignées. Passion de l’argent et du pouvoir, fraude, sensualité, violence gratuite ou dictée par les fossoyeurs de la patrie, sorciers bonimenteurs… tel est l’inventaire macabre de ce croquis amer inachevé qui va du témoignage à la chronique sans fausse pudeur et sans forfanterie.

Témoigner en quelque sorte, mais sans qu’il y ait procès, ni accusation. Non tant pour laisser sa trace, ni pour assumer la grandiloquence de certains confrères journalistes. Ni exhibitionnisme, ni fausse pudeur, le récit c’est tout.
Et "Dans l’enfer du paradis", c’est déjà considérable de jeter en pâture à la feuille blanche les questions cruciales les plus douloureuses de la plus désinvolture manière. Et ce qui séduit le plus dans l’œuvre, c’est justement l’émotion toujours contenue d’un écrivain que l’on sent la proie d’un grand désarroi devant le spectacle de la décomposition de son Enfer du Paradis.

AUTEUR

Saturné Salomon Garcia


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