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Pédophilie dans l’Eglise : « Notre collaboration avec la justice doit être totale »

mardi 12 avril 2016

Par Mgr Georges Pontier, archevêque de Marseille

Des victimes d’actes immoraux commis par des prêtres à des époques plus ou moins lointaines expriment leur souffrance, parfois leur colère et leur questionnement face à la manière dont les responsables de l’Eglise ont géré ces actes et leurs auteurs. Au nom des évêques de France, je tiens à leur exprimer notre écoute respectueuse, notre demande de pardon pour des actes commis par certains membres de l’Eglise dont on attendait un comportement conforme à leur vocation et à leurs engagements. Nous comprenons mieux la profondeur de la blessure subie et la possibilité que nous n’ayons pas géré toujours les situations de la meilleure manière.

Je voudrais ajouter quelques mots pour partager notre état d’esprit après notre travail des dernières assemblées de l’épiscopat à ce sujet. Depuis l’an 2000, notre prise de conscience de la souffrance des victimes n’a cessé de croître à l’instar de celle de l’ensemble de la société qui n’analysait pas d’une manière satisfaisante cette réalité auparavant. C’est ainsi que nous avons précisé un code de bonne conduite pour gérer ces situations. Le respect des victimes, notre devoir à leur égard et les exigences nouvelles du législateur obligent à porter à la connaissance des autorités judiciaires les faits portés à notre connaissance. De même, nous devons prendre les mesures canoniques qui s’imposent et enlever à l’auteur de ces actes toute responsabilité auprès de jeunes ou d’enfants. Notre collaboration avec les autorités judiciaires doit être totale, notre écoute des victimes ouverte et bienveillante. Nous avons également entrepris un travail de sensibilisation et de formation auprès des séminaristes, des prêtres et des éducateurs intervenant auprès d’enfants ou de jeunes dans les structures liées à l’Eglise. Nous souhaitons ardemment que tout cela porte ses fruits et que les procédures prévues soient appliquées.

Chaque situation est unique

Demeurent des décisions malheureuses, des faits anciens qui remontent à la surface parce que, souvent, les victimes elles-mêmes ne pouvaient pas s’exprimer. Leurs blessures étaient profondes et accentuées par le fait qu’une souffrance spirituelle s’ajoutait à celles d’ordre plus psychologique et que le contexte sociétal ne permettait pas de s’exprimer.

Ce sont ces faits anciens qui sont souvent révélés aujourd’hui et qui méritent d’être examinés avec attention. Chaque situation est unique et mérite un examen spécifique à la lumière de ce qui s’est passé, des décisions de justice éventuellement prises en leur temps et de leur application. La réalité manifeste qu’on a eu parfois affaire à des personnalités perverses dangereuses, mais aussi à d’autres qui, suite à des actes ponctuels inacceptables, se sont repris et ont bien vécu leur ministère depuis. Les solutions ne peuvent donc pas être uniformes. Demeure pour nous une question difficile : faut-il réduire un coupable aux actes qu’il a commis et pour lesquels il a purgé sa peine  ?

Si la justice n’a jamais été saisie de faits anciens dénoncés récemment, il nous appartient d’entendre les victimes avec respect, de saisir la justice pour qu’elle-même puisse porter à leur sujet une décision conforme aux lois de notre pays. S’il fut un temps où l’Eglise comme bien d’autres a pensé qu’on pouvait régler ces questions par des décisions particulières, souvent de l’ordre de la mutation dans un autre poste, ce temps est fini et laisse apparaître aujourd’hui qu’il n’était pas conforme au bien des victimes, à l’amendement du coupable et à la confiance en l’Eglise.

Qu’il me soit permis de dire mon estime aux prêtres qui, dans les paroisses, les mouvements, les missions diverses, mènent une vie de dévouement conforme à leurs engagements et au service de leurs frères, des enfants et des jeunes tout particulièrement. Il est injuste de laisser supposer que tout prêtre est un pédophile potentiel et tout évêque un complice malhonnête. J’ajoute encore à l’intention des prêtres et de la communauté catholique que cette épreuve nous appelle à la conversion de nos vies, à l’humilité. Ce n’est qu’à ce prix que notre témoignage pourra être entendu.


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