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Quel démineur pour succéder au pompier pyromane ?

samedi 27 février 2016

Evans Paul était devenu un Premier ministre pompier. Le qualificatif de pompier, il se l’était octroyé. Cela lui allait bien. En partant, ce vendredi, de la Primature, Évans Paul s’est fait pyromane. Il a allumé un feu qui risque déjà de consumer son remplaçant, si le Parlement va dans son sens. Ce rôle de chef de l’insurrection semble être du prêt-à-porter vite acheté pour celui qui s’était taillé un costume sur mesure de modéré conciliant. Évans Paul, en dénonçant les tares originelles qui s’accumulent dans le carnet de la présidence de Jocelerme Privert, risque aussi de faire rôtir dans l’enfer des règlements de comptes les ministres qui ont fait front avec lui pour sa dernière conférence de presse. La guerre est déclarée. On ne sait pas encore si une chasse aux sorcières va s’ouvrir pour faire payer au gouvernement sortant sa hardiesse ou si Privert et son Premier ministre Fritz Jean, qui ont d’autres chats à fouetter, vont laisser passer sans suite la caravane des partants. L’avenir dira le reste. Du 7 février, le jour de la victoire pour Jocelerme Privert, au 14 février, le jour de son installation, aux escarmouches médiatiques des derniers jours, les rapports humains entre lui et le premier ministre Évans Paul se sont détériorés à une vitesse accélérée. Dans ses discours comme en conférence de presse, le président Privert a été brutal avec le gouvernement sortant. Cela a alimenté les inimitiés. Le 7 février, pour son discours responsif à celui du président du Sénat, à sa conférence de presse de fin de règne de ce 26 février, comme pendant ses sorties dans la presse, le premier ministre Évans Paul a répondu, puis tancé le président provisoire Privert en s’attaquant aux bases fragiles de sa légitimité. Cela aussi a laissé des traces, de profonds sillons. Pour le moment, la mèche de la discorde brûle sur la place publique. Les acteurs peuvent s’engager dans une lutte fratricide ou prendre le temps de la réflexion pour éviter le clash cataclysmique qui nous menace. Fritz Alphonse Jean, le nouveau premier ministre, a déjà la mission de faire la paix avec le Parlement, de reprendre le dossier du dialogue, après le coup de force de Jocelerme Privert. Il a tout intérêt à vite nommer un gouvernement qui fera consensus. Pour réussir son passage devant les parlementaires, lors de la présentation de sa politique générale, Fritz Jean doit éteindre les incendies que les jusqu’au-boutistes de l’ancienne administration et les nouveaux opposants allument sur sa route. Il doit aussi apaiser le volume des revendications et des récriminations de son propre camp. Le temps presse. L’avantage dont jouit Fritz Jean, celui de la nouveauté, ne va pas durer. Son principal allié est cependant le temps. Si le Parlement fait obstacle et le place dans la position d’un chef de gouvernement de facto, l’empêche de gouverner, cela ne fera que retarder l’organisation des élections et prolongera de fait le mandat de la transition. En cours de route, comme c’est souvent le cas avec les blocs parlementaires, on verra les ambitions se rapetisser aussi vite que le premier ministre disposera de moyens pour débaucher les élus aux pieds légers, déjà disponibles pour faire allégeance au premier dispensateur de projets en puissance. Sur la route de la gouvernance, les obstacles viendront aussi de chacune des décisions du premier ministre et de son équipe. L’équilibre sera le maître mot pour faire avancer le frêle esquif de la transition. Après le pompier pyromane, l’économiste de Sainte-Suzanne saura-t-il être le démineur de service ? C’est tout le bien que l’on souhaite au nouveau premier ministre de cette fragile transition s’il passe les prochaines semaines en selle. L’haridelle de la politique haïtienne est rebelle, le PM du KID en sait quelque chose.
Frantz Duval duval@lenouvelliste.com


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