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Nucléaire iranien : le délai des négociations prolongé in extremis ?

jeudi 25 juin 2015

Le ministre iranien Mohammad Javad Zarif et son homologue américain John Kerry vont tenter de conclure un accord souvent qualifié d’historique.

L’Iran et les grandes puissances entament cette fin de semaine à Vienne un ultime marathon de négociations pour solder le très épineux dossier nucléaire iranien. Des discussions sans garantie de succès. Après de longues années de tensions et 20 mois de discussions acharnées, ils vont s’efforcer de mettre le point final à un accord souvent qualifié d’historique. Le délai limite, mardi 30 juin, pourrait être prolongé in extremis.

Le ministre iranien des Affaires étrangères Mohammad Javad Zarif est attendu samedi matin dans la capitale autrichienne, où il retrouvera son homologue américain John Kerry, arrivé quelques heures plus tôt. La chef de la diplomatie européenne, Federica Mogherini, arrivera aussi "ce week-end", tout comme sans doute les autres ministres du groupe "5+1" (Chine, États-Unis, France, Royaume-Uni, Russie et Allemagne).

"Lignes rouges"

L’accord qu’ils négocient doit garantir pour l’avenir que le programme nucléaire de la République islamique sera uniquement civil, en échange d’une levée des nombreuses sanctions internationales qui entravent depuis 2005 l’économie iranienne. Le soupçon, toujours démenti par l’Iran, que ce pays chercherait à s’équiper de l’arme nucléaire empoisonne les relations internationales depuis douze ans.

Dans la région, la perspective d’une bombe iranienne effraie Israël, mais aussi les grands rivaux sunnites de l’Iran chiite, en premier lieu l’Arabie saoudite. Un accord serait aussi le premier pas d’une possible réconciliation entre la République islamique et les États-Unis, brouillés depuis 35 ans. Il ouvrirait la perspective de coopérations face au chaos en Syrie, en Irak et ailleurs.

Il aurait, également, un impact sur le marché mondial de l’énergie, en libérant les immenses réserves iraniennes d’hydrocarbures. À l’entrée de la dernière ligne droite, les parties font monter les enchères, le guide suprême Ali Khamenei réaffirmant les "lignes rouges" de l’Iran, et John Kerry rappelant qu’un échec reste possible.

Complexité

L’ayatollah Khamenei, qui a le dernier mot dans le dossier nucléaire, a exigé la levée "immédiate" des sanctions économiques de l’ONU et des États-Unis en cas d’accord, et réitéré son refus de toute inspection des "sites militaires". Il a aussi dit sa méfiance envers l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), l’organe de l’ONU chargé de vérifier en Iran l’application de l’accord espéré. "On déterminera dans les derniers jours si, oui ou non, les questions en suspens sont traitées. Si (l’Iran) n’y répond pas, il n’y aura pas d’accord", a répliqué à distance John Kerry. La France et le Royaume-Uni répètent de leur côté que tout accord devra comprendre un accès "si nécessaire" à des sites militaires.

En dehors même de ces points de discorde, l’accord s’annonce techniquement très complexe. Les experts et les diplomates, qui se trouvent déjà à Vienne depuis le début du mois, tablent sur un document de 40 à 50 pages, dont chaque détail est susceptible d’être négocié pied à pied. Au fil de milliers d’heures de pourparlers, l’Iran a déjà lâché d’importantes concessions, qui ont permis de conclure un pré-accord début avril à Lausanne.

En pratique, Téhéran devra réduire ses capacités nucléaires en se débarrassant d’un grand nombre de ses centrifugeuses - les machines qui permettent d’enrichir l’uranium. Les grandes puissances ont calculé que cette diminution porterait à au moins un an, au lieu de quelques mois en 2013, le temps qu’il faudrait au pays pour produire du matériau en quantité suffisante pour confectionner une bombe nucléaire. Pour s’en assurer, elles misent sur un régime serré d’inspections, conduites sur les sites iraniens par l’AIEA.

"Nous comptons y arriver"

En cas d’infraction, elles veulent que les sanctions contre l’économie iranienne puissent être rétablies facilement. Quelles que soient les difficultés, un responsable américain a assuré jeudi que le projet des négociateurs était de rester à Vienne "jusqu’à ce que nous en ayons terminé, ou conclu que nous n’y parviendrons pas".

Après Paris et Téhéran, Washington a ainsi reconnu que l’échéance fixée au 30 juin pourrait être dépassée, comme cela avait été le cas à Lausanne ce printemps. "On ne le fera peut-être pas pour le 30 juin, mais on en sera proche", a confié ce cadre de l’administration américaine à la veille du départ pour Vienne du ministre des Affaires étrangères John Kerry, pour participer à la dernière ligne droite des tractations entre les grandes puissances et l’Iran. C’est la première fois que Washington reconnaît que la date butoir du 30 juin n’est pas gravée dans le marbre. L’Iran et la France avaient déjà exprimé leur scepticisme il y a plusieurs semaines sur le strict respect des échéances.

"Ce qui compte, c’est le contenu de l’accord et il faut qu’il soit bon", a défendu le responsable américain, dont le gouvernement martèle depuis des mois qu’il cherche "un bon accord, pas n’importe quel accord". Le responsable américain a assuré que le projet des négociateurs était de rester à Vienne "jusqu’à ce que nous en ayons terminé, ou conclu que nous n’y parviendrons pas". "Mais nous comptons y arriver", a-t-il ajouté.


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