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L’ONU appelle à sauver les migrants que la Birmanie veut déporter

samedi 23 mai 2015

200 migrants secourus au large des côtes birmanes vont être envoyés au Bangladesh. Un sauvetage dénoncé par les bouddhistes anti-musulmans de Birmanie.

Serait-ce le début d’un sauvetage pour les milliers de migrants perdus en mer dans le sud-est asiatique ? La Birmanie a annoncé samedi le renvoi au Bangladesh de plus de 200 migrants secourus au large de ses côtes. Ces 208 migrants, découverts entassés torse nu dans un bateau en bois, sont accueillis depuis vendredi près de la ville de Maungdaw, point de départ pour de nombreux bateaux bondés d’habitants locaux fuyant la Birmanie. Les autorités birmanes affirment qu’ils sont originaires du Bangladesh.

"Nous leur fournissons une assistance humanitaire. Après cela, nous les renverrons dans leur pays", a déclaré Zaw Htay, porte-parole de la présidence birmane, assurant être déjà "en contact avec les gardes-frontières du Bangladesh". Les gardes-côtes bangladais ont affirmé qu’une équipe se rendrait bientôt en Birmanie. "Notre commandant va s’y rendre, le processus devrait prendre deux ou trois jours", a déclaré le commandant Abu Russell Siddiki, un porte-parole au poste frontalier de Teknaf. Une source autorisée a précisé que le Bangladesh voulait s’assurer que la Birmanie ne renvoyait pas des Rohingyas, minorité musulmane persécutée.

Premier sauvetage birman

Le bateau, remorqué vendredi matin, est le premier à bénéficier d’un sauvetage de la part des autorités birmanes depuis l’éclatement de la crise début mai, révélée par un durcissement de la politique de la Thaïlande, habituel pays de transit. La Birmanie, en proie à un nationalisme bouddhiste anti-musulman, est au coeur de ce problème régional, nombre de migrants qui prennent la mer appartenant à la minorité rohingya dans ce pays. L’autre principal flux de migrants vient du Bangladesh voisin.

Selon l’ONU, des milliers de migrants venant de Birmanie et du Bangladesh sont en perdition dans le golfe du Bengale alors que la mousson approche. Plusieurs pays de la région ont assoupli leur politique cette semaine, sous la pression internationale : la Malaisie et l’Indonésie ont ainsi arrêté de repousser les bateaux. Plus de 3 500 migrants ont été accueillis en Malaisie, en Indonésie et en Thaïlande. Ces pays ont insisté, comme la Birmanie, sur le fait que cet accueil n’était que temporaire, en attente de leur transfert vers un pays tiers. Dans le cas de la Birmanie, s’ajoute le fait que la question des Rohingyas est taboue. Et l’opposante Aung San Suu Kyi elle-même est muette sur le sujet depuis le début de la crise.

Des bouddhistes en colère

Le sauvetage vendredi du bateau de migrants a suscité la colère des nationalistes bouddhistes extrémistes. Le plus virulent d’entre eux, le moine Wirathu, connu pour ses diatribes anti-musulmanes, a dénoncé sur sa page Facebook un accueil réalisé "sous la pression internationale". "Si l’on porte secours à ces gens, le danger viendra", a-t-il ajouté. En visite à Hanoï, le secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon a appelé samedi les pays de la région à ne pas relâcher leurs efforts, rappelant que la "première priorité" était de sauver les vies des milliers de migrants en perdition en mer. "Lorsque les gens sont à la dérive en mer, la première priorité est d’aller à leur recherche, de les sauver et de leur fournir une assistance humanitaire", a déclaré le secrétaire général de l’ONU aux journalistes.

Il a exprimé l’espoir que les pays de la région s’attaqueraient aux "racines" de l’exode des Rohingyas, minorité persécutée en Birmanie, et de Bangladais fuyant la misère, lors d’une conférence régionale prévue en Thaïlande le 29 mai. Mais la Birmanie, qui a d’abord envisagé de ne pas participer à cette conférence, ne donne pas de signe de vouloir reconnaître ou améliorer les conditions de sa minorité rohingya afin de mettre fin à leur exode. Alors que cette communauté est estimée à 1,3 million de personnes en Birmanie, ses membres restent apatrides et privés de tout droit. Et les autorités birmanes les voient toujours comme des immigrés illégaux du Bangladesh voisin, même ceux installés depuis des générations.

L’exode des boat-people de Birmanie et du Bangladesh vers la Malaisie et l’Indonésie, via la Thaïlande, dure depuis des années. Mais le phénomène a pris une tournure dramatique début mai avec la désorganisation des filières clandestines à la suite de la nouvelle politique répressive de la Thaïlande.


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