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Construction : Royal Oasis, Marriott, une firme haïtienne à l’oeuvre

mercredi 4 mars 2015

Peu de gens savent que c’est Architecture construction technique SA (Arcotec), une firme de construction haïtienne, qui a effectué les travaux de terrassement et les grosses œuvres lors de l’érection des plus imposants deux hôtels : Royal Oasis et Marriott. Adossé à une réputation construite au forceps, le patron de cette firme, Grégory Figaro, dit les vérités, les besoins du secteur de la construction, moteur de l’économie.

Le téléphone sonne. Deux bips. On décroche. « Je suis à l’hôtel ! », confie furtivement Grégory Figaro avant de retourner à sa réunion, lundi, en début de soirée. Ne demandez pas lequel. C’est « Marriott », à Turgeau, un autre chantier mené à bien, à côté de celui de Royal Oasis, qui étoffe son portfolio, donne du poids à la firme Arcotec qu’il dirige. Sa compagnie, chargée d’effectuer le terrassement et les grosses œuvres, a fait un travail « impeccable, dans les délais ». Il n’en est pas peu fier.

Plus que la fierté, c’est une réputation qui se construit dans la douleur en Haïti où tout est compliqué, ajoute Grégory Figaro. Son acharnement de « hard worker », l’implication d’une équipe soudée, exigeante, ont donné des résultats. Le portefeuille de projets de Arcotec, par an, selon l’année, peut varier entre 5 et 20 millions de dollars US, indique-t-il. Ce n’est pas par choix, mais « la majorité de mes clients sont des étrangers qui construisent en Haïti », explique Grégory Figaro, la bouche pleine de critiques vis-à-vis de l’État, un gros opérateur qui n’encourage pas les firmes de construction locales. « Nous sommes désavantagés très souvent dès l’appel d’offres », confie Grégory Figaro.

Le préjugé, préjudiciable aux firmes locales, « est très fort ». Pour l’État, les firmes locales n’ont pas la capacité ni les compétences nécessaires. « La tendance consiste à accorder le bénéfice du doute aux firmes étrangères alors que celles d’ici sont coupables avant d’être jugées », déplore ce manager formé aux USA. Pourtant, soutient Grégory Figaro, dans beaucoup de cas, ce sont des firmes locales qui sont sous-traitées pour effectuer les travaux. Pour lui, il est temps de faire plus de confiance et pas moins d’exigences aux firmes locales. « Le plus souvent, on accepte des sous-contrats à des prix d’exécution non favorables », détaille Grégory Figaro, qui ratisse large sur le terrain de la critique.

Dans son viseur, il y a les assureurs. « Il serait important que les compagnies d’assurances développent des produits pour les compagnies locales de construction. Cela permettrait au secteur et à l’économie d’avancer », rappelle le patron de Arcotec. Au lieu de geler des fonds importants comme garantie dans une banque, il serait intéressant qu’on paie 1,2, 3 pour cent, ou un pourcentage à déterminer par les actuaires, aux assureurs en fonction des risques pour assurer nos opérations, explique Grégory Figaro.

Il tance le secteur bancaire. « Beaucoup de banques sont complètement incompétentes dans l’analyse du portfolio d’un client potentiel. Des fois, à cause de leur incompétence, elles prennent de mauvaises décisions », affirme Grégory Figaro, qui juge essentielle l’obtention de crédit important pour faire plus, être encore plus compétitif. Pour lui, il faut que les banques aient des professionnels de plusieurs disciplines dans l’analyse des dossiers. Elles ne sont pas toutes dans le même sac, nuance-t-il, sans revenir sur la nécessité de faire un effort de ce côté-là. Arcotec, qui dispose d’une usine de fabrication de béton, joue un rôle important dans l’économie. Elle veut, peut et va faire plus, gage Grégory Figaro, qui veut plus de crédit, plus de défis, plus de confiance pour décrocher la lune, continuer à construire, entre autres, des bâtiments commerciaux et industriels...

Jerry Tardieu, copromoteur du projet Royal Oasis et P.D.G. de la société, aujourd’hui propriétaire de l’hôtel, confie que « la compagnie ARCOTEC a effectué les travaux de terrassement et de gros-œuvre de l’hôtel Royal Oasis à la grande satisfaction des promoteurs de l’hôtel ». Ces travaux, détaille-t-il, incluaient la percée d’une route périphérique, la construction de trottoirs, d’un dalot d’évacuation et du drainage général du site ». Le choix d’une firme haïtienne s’est basé sur une exigence de compétence et de préférence pour une firme haïtienne.

« A compétence égale, les promoteurs du projet avaient décidé de privilégier le choix d’entrepreneurs locaux pour la construction de l’hôtel », explique Jerry Tardieu, ajoutant « qu’ Arcotec, avec les ingénieurs Patrick Figaro et Pompidou Dorval, offrait toutes les garanties techniques que le travail se ferait dans les normes et comme de fait, le travail s’est fait dans les normes ». Le séisme du 12 janvier a constitué un test grandeur nature pour le chantier non encore achevé à l’époque. « Lors du tremblement de terre du 12 janvier, alors que les immeubles avoisinants s’écroulaient, la structure de l’hôtel Royal Oasis n’a pas bronché. Les ouvriers qui y travaillaient n’ont même pas réalisé qu’il y avait un tremblement de terre », a raconté Jerry Tardieu, cheville ouvrière du projet Royal Oasis.

« Nous sommes très satisfait. Arcotec a fait un travail excellent. Elle a délivré le gros-œuvre dans les délais et selon les normes déterminées par notre general contractor Kier Construction et notre firme de contrôlé Bruce Shaw », confie Maarten Boute, numéro un de Digicel Haïti, propriétaire de l’hôtel Marriott, fraichement inauguré. « Le fait que ce soit une firme haïtienne qui ait gagné l’appel d’offres en battant des firmes dominicaines est une fierté de plus pour nous tous », selon Maarten Boute.

Personne n’aurait cru, il y a quelques années, qu’une firme haïtienne de construction pouvait construire des immeubles de douze étages en béton, des constructions qui résistent au tremblement de terre et qui soutiennent la comparaison face aux compagnies étrangères. ARCOTEC et d’autres entreprises du secteur de la construction apportent la preuve par neuf que nos ingénieurs sont ingénieux et sérieux.

AUTEUR

Roberson Alphonse

robersonalphonse@lenouvelliste.com


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