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24 février 1525. À Pavie, François Ier est fait prisonnier par l’armée impériale !

mardi 24 février 2015

Fasciné par l’Italie comme ses prédécesseurs, il ne rêve que de victoire. Mais il ne fait que se jeter dans la gueule du loup.

Frédéric Lewino et Gwendoline Dos Santos

Sur son cheval caparaçonné, François Ier se bat comme un beau diable. Il est impressionnant. À 31 ans, ce géant est au mieux de sa forme. Revêtu de son armure, il découpe en tranches les lansquenets qui l’entourent. À ses côtés, les gentilshommes de sa maison combattent avec le dernier acharnement. Autour d’eux, des milliers de gents d’armes s’éventrent. Des boulets fendent les airs. Les trompettes relaient les ordres. Mais les troupes françaises cèdent peu à peu, l’armée impériale prend le dessus. Les cavaliers français alourdis par leurs armures sont jetés bas par la piétaille et poignardés à la jointure des cuirasses sans pouvoir se défendre. Ils sont saignés comme des porcs.

Le roi voit se précipiter vers lui le marquis de Civita Sant’ Angelo. Il n’a que le temps de mettre sa lance en arrêt pour empaler son assaillant. Son entourage tente de rameuter des troupes, mais elles ne parviennent pas à se frayer un chemin dans la cohue. Dans le camp impérial, des cris s’élèvent : "Victoire ! Victoire ! Espagne ! Espagne ! Le roi est pris !" En entendant ces cris, les soldats du camp français s’enfuient épouvantés. Bonnivet, voyant combien il a mal conseillé le roi, enlève son heaume et fonce vers l’ennemi pour mourir. De nombreux soldats français, dans leur hâte à quitter le champ de bataille, plongent dans le Tessin et meurent noyés.

François Ier, pris en sandwich

François est désormais seul, entouré des piétons et arquebusiers espagnols. Le sonneur du roi continue à s’époumoner pour rallier les secours. En vain. Le capitaine César Hercolani est le premier à blesser le cheval du roi. Celui-ci s’abat. Le roi combat maintenant à pied, faisant tournoyer sa grande épée. Il est blessé à la main, au visage. Le sang coule. Trois Espagnols se précipitent : Diego Davila, Juan de Urbieta et Alonso Pita da Veiga. Chacun veut faire prisonnier le Français ou le tuer. Celui-ci n’est sauvé que par la survenue de Lannoy, le vice-roi de Naples, natif de Valenciennes. Il fait reculer ses hommes et crie au roi de déposer les armes : "Sire, nous vous connaissons bien ; rendez-vous, afin de ne vous faire tuer ; vous voyez bien (...) que vos gens s’enfuient et que votre armée est défaite." Le géant sent que c’est la voix de la raison. Il soulève la visière de son heaume, laissant voir un visage rouge. Il est épuisé, cherche son souffle. Il enlève son gantelet de fer, qu’il remet au vice-roi. On l’aide à retirer son heaume. François Ier arrache les restes de sa cuirasse, le voilà aux trois quarts nus. "Sire, êtres-vous blessé ?" s’enquiert Lannoy. "Non... guère." Dans le camp ennemi, trompettes, clairons, tambourins et fifres répandent la nouvelle de la victoire. Mais durant de longues minutes, les Espagnols, ivres de sang, continuent leur massacre. Combien de morts ? Dix mille ? Vingt mille ? Nul ne le saura jamais.

Mais qu’est venu donc faire le roi de France dans cette galère italienne ? Mégalo, il a voulu poursuivre le rêve italien de ses prédécesseurs. N’écoutant pas les avis de ses vieux conseillers La Trémoille et le maréchal de La Palice, il décide, fin 1524, d’aller reprendre Milan, perdue quatre ans plus tôt, aux troupes impériales de Charles Quint. Dans un premier temps, sa campagne est un succès. Effectivement, il s’empare de Milan. François pourrait se satisfaire de cette victoire. Mais, non, ce grand enfant qui ne rêve que de batailles et de gloire décide de poursuivre son avantage en mettant le siège devant Pavie, l’ancienne capitale de la Lombardie, le 27 octobre 1524. Il faut maintenant attendre. Mais trois mois plus tard, des renforts venus de Bruxelles assiègent à leur tour l’armée française. C’est l’arroseur arrosé. Durant trois semaines, François Ier est pris en sandwich.

La geôle de Charles Quint

Dans la nuit du 23 au 24 février, les "Belges" passent à l’attaque du camp français. Ils sont emmenés par Charles de Bourbon, l’ancien chef des armées de François Ier, le même qui lui avait fait gagner la bataille de Marignan. Se jugeant mal récompensé, il est passé à l’ennemi. L’état-major du roi de France lui conseille de lever le camp et de battre en retraite. Les forces ennemies sont trop importantes. Mais une fois de plus le souverain n’écoute que son tempérament guerrier. Ou plutôt Guillaume Gouffier de Bonnivet, qui dénonce dans un beau discours l’indignité pour un roi de France à s’enfuir. Voilà comment François Ier se jette tête baissée dans la défaite, la honte et la geôle de Charles Quint.

Le lendemain de sa capture, il écrit un mot à sa mère, la duchesse d’Angoulême, à qui il avait confié la régence du royaume avant son départ. "Madame, pour vous faire savoir comme se porte le reste de mon infortune, de toutes choses ne m’est demeuré que l’honneur, et la vie qui est sauve." Il fait également porter un billet à son vainqueur, Charles Quint. Il ne fanfaronne plus. Il met sa fierté tout au fond de sa poche avec trois enclumes par-dessus. "N’ayant d’autre réconfort en mon infortune que l’estime de votre bonté, vous suppliant de juger en votre propre coeur ce qu’il vous plaira à faire de moi, étant sûr que la volonté d’un tel prince que vous êtes ne peut être accompagnée que d’honneur et magnanimité (...) Votre bon frère et ami. François".

Septième guerre d’Italie

Revenons à Pavie. Le souverain français, à demi nu, est amené dans une petite maison (la cascina Repentita) pour être lavé et pansé. Un soldat espagnol lui présente six balles en argent et une en or. Les premières étaient destinées aux principaux officiers de ses armées. "Les six ont été employées, la vôtre m’est restée, et je vous supplie, sire, de l’accepter pour la faire servir à votre rançon", dit l’homme. Après le repas, on conduit le prisonnier à l’abbaye de San Paolo. Le surlendemain, il est transféré dans une forteresse près de Crémone. Il y reste 80 jours. Charles Quint aurait pu profiter de son avantage pour poursuivre la guerre, mais c’est un homme de paix. Il fait cesser les hostilités et fait venir son prisonnier en Espagne, le faisant enfermer d’abord à Valence, puis dans la citadelle de Madrid. En guise de rançon, il demande à ce que le roi français cède plusieurs territoires. François Ier refuse durant de longs mois. Il finit même par tomber malade. On le croit à l’article de la mort. L’empereur consent à le visiter. Il autorise même la soeur de François, Marguerite de France, à la voir. François 1er tente de s’évader. Il échoue.

Finalement, après avoir joué au fier-à-bras, le souverain français signe tout ce que veut Charles Quint en janvier 1526. C’est le traité de Madrid. François renonce à ses ambitions italiennes, consent à rendre la Bourgogne, s’engage à épouser la soeur de l’empereur et accepte d’envoyer ses deux fils en otage à sa place en attendant de remplir ses engagements. Le 6 mars, François Ier est libéré. Le 22 mars, il dénonce le traité de Madrid signé, dit-il, sous la contrainte. Avec le pape, il entame la septième guerre d’Italie. Et tant pis pour ses deux fils maltraités dans les geôles espagnoles. Ils y resteront quatre ans. Ils en garderont des séquelles psychologiques. Il s’en fout. Du moment qu’il peut faire le beau. Ah, François...
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