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Contre le terrorisme, les conseils de la Chine aux démocraties

lundi 16 février 2015

Selon des médias contrôlés par le régime, la liberté d’expression, nouvelle bête noire de Xi Jinping, a favorisé les attaques terroristes

De notre correspondant en Asie, Sébastien Falletti

L’occasion était trop belle. Au lendemain du drame de Copenhague, la Chine donne la leçon à une Europe déboussolée par l’irruption de la violence en son coeur. Officiellement, bien sûr, Pékin se joint au concert international de condamnations des attaques meurtrières qui ont frappé ce week-end la capitale danoise, lutte antiterrorisme planétaire oblige. Mais la presse contrôlée par le régime prend moins de gants et saute sur l’occasion pour s’attaquer à la "liberté d’expression", nouvelle bête noire du président Xi Jinping. "La liberté de parole affaiblit la lutte antiterroriste en Europe", assène le très nationaliste Global Times, ce lundi. Pour ce quotidien proche du parti, la liberté de ton en vigueur dans les démocraties occidentales porte une lourde responsabilité dans les drames qui ont frappé Charlie Hebdo et maintenant le Danemark.

En clair, les gouvernements européens récoltent ce qu’ils méritent en laissant la main libre à des caricaturistes tels Lars Vilks, pour "ridiculiser continuellement l’islam", estime l’éditorialiste Liu Zhu. "L’Europe n’a pas pris la bonne approche. Sa volonté de défendre la liberté d’expression est plus forte que celle de rassembler les musulmans. Cela contribue à accroître les tensions", juge le Global Times. Et d’appeler les autorités du Vieux Continent à interdire le blasphème et à faire plus d’efforts pour respecter les communautés musulmanes.

Des conseils qui ne manquent pas de sel, à l’heure où Pékin accentue la répression contre le "radicalisme islamique" au Xinjiang. La burqa est désormais interdite dans cette province du grand ouest chinois, peuplé majoritairement d’Ouïghours de confession musulmane où une reprise en main sécuritaire musclée est en cours, à l’abri des regards des médias. Dimanche, un haut responsable chinois a exhorté les représentants religieux du pays à "exercer une influence saine et positive", alors que des rumeurs d’attentats durant le Nouvel An chinois, circulent.

Mise au pas

Les attaques à Paris et Copenhague offrent un argument inattendu pour justifier le contrôle de l’information à Pékin, au moment même où le régime resserre l’étau sur l’Internet, les médias et les universités. "Certains pays européens doivent apprendre à faire des compromis et brider leurs discours publics", assène le journal. Comme en Chine, où depuis le début de l’année, une salve de nouvelles mesures visent à empêcher l’accès via la technologie des VPN (Virtual Personal Network) aux sites interdits par la censure, tels Facebook, Twitter ou le New York Times. En janvier, le Politburo a décrété une nouvelle mise au pas idéologique des universités, interdisant l’enseignement des dangereuses "valeurs occidentales", dont la liberté d’expression, au nom de la "sécurité nationale".

Déjà, au lendemain de l’attaque contre Charlie Hebdo, le Global Times avait pointé du doigt la responsabilité des caricaturistes effrontés. Une position radicale qui avait suscité néanmoins certaines critiques, y compris de certains médias chinois. Telle une journaliste à Phoenix TV qui avait répliqué qu’aucune circonstance atténuante ne pouvait être trouvée à l’assassinat d’innocents. Pas même la défense de la sacro-sainte censure qui accroît son emprise sur l’empire du Milieu.


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