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4 novembre 1930. Bien avant Coluche, Al Capone invente les restos du coeur à Chicago

mardi 4 novembre 2014

Pour Thanksgiving, le gangster offre de la dinde à 5 000 victimes de la Grande Dépression. Mais quel philanthrope !

Par Frédéric Lewino et Gwendoline Dos Santos
Une longue file d’hommes et de femmes patiente devant le 935 South State Street, un immeuble situé dans l’un des quartiers les plus pauvres de Chicago. La double porte vitrée à battants est surmontée d’une grande banderole blanche sur laquelle chacun peut lire : "Gratuit. Soupe, café et doughnuts pour les chômeurs". Nous sommes le 4 novembre 1930, jour de Thanksgiving (les actions de grâce). L’Amérique est plongée en pleine récession, des millions de malheureux ont perdu leur emploi, malgré les promesses de Montebourg de trouver un repreneur pour chacune de leurs entreprises... La Grande Dépression frappe de plein fouet l’Amérique, qui crève de faim. Mais le gouvernement s’en fiche comme de la Bretagne... C’est alors que la plus grande fripouille du pays décide de venir au secours des pauvres crevant la dalle. Al Capone ouvre une soupe populaire à Chicago, où cinq mille miséreux peuvent croquer à pleines dents dans un morceau de dinde.

Al Capone aurait-il rencontré Coluche ou encore glissé dans son lit soeur Emmanuelle ? Comment expliquer cette générosité alors que l’homme a la réputation d’être le plus terrible des tueurs ? Ce revirement est aussi étonnant qu’un Rom décidé à ne plus mendier ou encore un joueur de foot acceptant de payer ses impôts. Car, bien sûr, il y a une raison cachée derrière le geste du gangster. Il sait les poulets sur ses talons. Ceux-ci on déjà coffré son frère Ralph et son directeur financier pour fraude fiscale. Cela lui pend au nez. Comme les flics sont incapables de l’arrêter pour ses crimes, le FBI veut le faire condamner pour évasion fiscale. C’est pourquoi, sur les conseils de ses avocats, Al Capone décide de se bâtir une image de philanthrope. Passer du statut d’ennemi public numéro un à celui d’ami public numéro un. Et comment mieux y arriver qu’en remplissant le ventre creux des milliers de chômeurs ayant perdu leur emploi ? C’est que son nouveau bavard, Me Dupond-Moretti, est malin comme un singe : s’il a pu faire acquitter le docteur Muller du meurtre de son épouse, il est bien capable de le faire passer pour Gandhi en personne...

Un gangster au milieu de notables

Voilà donc Al Capone qui ouvre une soupe populaire durant l’hiver 1930-1931. Le jour de Thanksgiving, deux reporters du Chicago’s American sont présents sur place pour photographier le gangster au milieu de notables de Chicago, hommes politiques et responsables d’association de charité. L’un d’eux raconte : "J’ai allumé le flash pendant que Bob retirait le bouchon de l’objectif. L’explosion a été assourdissante et la fumée a rempli la pièce. Je me suis retrouvé en train de me pencher par la fenêtre pour aspirer de l’air frais en compagnie de Capone. Les gardes du corps se tenaient debout, le pistolet à la main, cherchant un éventuel assaillant. Quoi qu’il puisse être, Capone avait un bon sens de l’humour."

Quarante jours durant, à raison de trois festins quotidiens offerts à mille personnes, le resto du coeur d’Al Capone sert 120 000 repas. Il n’y a pas tous les jours de la dinde au menu, parfois du pot-au-feu, du poulet. Le plus souvent une bonne soupe roborative et du pain. À 31 ans, le gangster est l’homme le plus puissant de Chicago. Il empoche, dit-on, jusqu’à 6 millions de dollars par semaine grâce au racket, au proxénétisme et au trafic d’alcool.

Dans le collimateur des fédéraux

Aussi, les 12 000 dollars qu’il aurait dépensés pour nourrir les chômeurs ne sont qu’une goutte de soupe dans un chaudron. D’autant que ses hommes de main ont gentiment invité les commerçants du quartier à verser leur obole. Pourtant, le gangster n’atteint pas totalement son objectif. Si son apparente générosité lui vaut la reconnaissance populaire, en revanche, ni l’attorney général, qui est à ses basques, ni le fisc ne se laissent impressionner. Au contraire même, ils se demandent d’où vient le pognon. La presse a beau donner la parole aux pauvres qui affirment que le bootlegger (trafiquant d’alcool) fait davantage pour eux que le gouvernement, Capone reste dans le collimateur des fédéraux, qui mettent même les bouchées doubles... après le fameux repas de Thanksgiving.

Le 5 juin 1931, Capone est inculpé pour fraude fiscale et infraction à la loi sur la prohibition. Quatre mois plus tard, il est mis sous les verrous pour huit ans. C’est à son tour de goûter à la bonne soupe gratuite de l’État.
C’est également arrivé un 4 novembre

1995 - Assassinat d’Yitzhak Rabin par un extrémiste juif.

1995 - Mort du philosophe Gilles Deleuze.

1984 - Début des transmissions de la chaîne Canal+, première chaîne privée payante.

1979 - Des étudiants iraniens prennent en otages 90 personnes de l’ambassade américaine à Téhéran.

1963 - Les Beatles donnent un concert devant la reine d’Angleterre.

1956 - Les Soviétiques écrasent la révolte hongroise.

1954 - Premiers décollage et atterrissage verticaux d’un avion : le Convair XFY-1, en Californie.

1948 - T.S. Eliot reçoit le prix Nobel de littérature.

1943 - Naissance de Marlène Jobert.

1922 - L’égyptologue britannique Howard Carter pénètre dans le tombeau de Toutankhamon.

1916 - Naissance de Ruth Handler, créatrice de la poupée Barbie.

1879 - L’Américain James J. Ritty invente la caisse enregistreuse.

1846 - Premier brevet déposé pour une jambe artificielle par Benjamin F. Palmer, dans le New Hampshire.


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