MosaikHub Magazine

Demotivateur, le site qui donne la banane

lundi 3 novembre 2014

Par Adrien Bonetto
Créé par trois étudiants, le site est devenu le premier média social de divertissement français. Retour sur une success-story à la française.

À moins de ne pas être inscrit sur Facebook ou de ne pas avoir de connexion internet, vous avez sûrement entendu parler de Demotivateur, un site de "divertissement", c’est-à-dire de nouvelles réconfortantes, insolites ou drôles. Le site est le nouveau leader en France sur ce créneau de plus en plus porteur : 30 millions de visites, 50 millions de pages vues, 3,2 millions de partages sur Facebook en septembre... Des chiffres qui donnent le tournis ! Dans une actualité souvent morose et déprimante, Demotivateur, comme son nom de l’indique pas, vous remonte le moral, à coups d’histoires de chats (beaucoup), de listes farfelues, de vidéos délirantes. Rencontre avec l’un des créateurs du site : Michal Sikora.

Le Point.fr : Comment est né Demotivateur ?

Michal Sikora : Avec mon frère Pawel, nous avons rencontré Ari Cohen en 2010 pendant nos études à l’IESA et à l’Epitech. Durant cette période, nous avons lancé les premières pages du site Demotivateur.fr. Devant le succès, nous avons décidé tout naturellement de poursuivre le projet après nos études.

Selon vous, qu’est-ce qui explique votre succès ?

Aujourd’hui, il y a une nouvelle façon de lire les médias, un nouveau rapport à la presse avec le développement du numérique. En plus de l’actualité et de la presse traditionnelle, les gens recherchent des histoires dans lesquelles ils se retrouvent, des articles qui vont les distraire tout en leur apprenant des choses, des contenus drôles, touchants ou des sujets de société qui leur tiennent particulièrement à coeur et qu’ils ont envie de partager.

Depuis le début, on met un point d’honneur sur l’éditorial. Lorsqu’on rédige un article, la question que l’on se pose toujours, c’est : "Est-ce que cet article va faire rêver des millions de personnes ?" Et le pari est réussi puisqu’on en est à une croissance exponentielle, notre contenu est lu plus de 50 millions de fois par mois et notre communauté augmente de jour en jour. Sur Facebook, nous avons près de 800 000 fans.

Quel est le "portrait type" de vos lecteurs ?

C’est vraiment difficile de le définir avec précision. Nos articles touchent vraiment beaucoup de monde dans la France entière et notre lectorat est donc très varié. Toutes les tranches d’âge et tous les milieux sociaux peuvent s’y retrouver. Cependant, la tranche 25-34 ans représente la part la plus importante, avec à peu près autant d’hommes que de femmes.

Quelle est la part des réseaux sociaux sur votre audience ?

40 % de notre trafic provient des réseaux sociaux. En revanche, nous avons un net avantage sur la plupart des sites de "buzz" qui sont complètement dépendants des réseaux sociaux : plus de la moitié de nos lecteurs (55 %) accèdent directement au site en tapant Demotivateur dans leur navigateur ou via leurs favoris. Cela nous conforte dans l’idée que nous avons une communauté très forte, très fidèle, et que les lecteurs nous apprécient au-delà des phénomènes liés au simple buzz. Ils reviennent d’eux-mêmes sur Demotivateur.fr et retiennent le nom du site pour y accéder par la suite.

Quelles sont vos sources ?

Nous avons développé une technologie qui s’appelle le Viral Curtaor. Elle identifie chaque seconde les sujets qui se partagent le plus sur les réseaux sociaux. L’équipe éditoriale rédige alors des articles sur les sujets qui plairont le plus à la communauté.

Quel est le plus gros buzz depuis la création ?

Cette question est doublement intéressante, car elle montre, d’une part, à quel point le contenu de Demotivateur a évolué et, d’autre part, elle témoigne de l’évolution des tendances sur Internet et de nouvelles attentes des lecteurs. Notre article le plus partagé est une campagne de prévention pour la sécurité routière. En quelques jours, nous avons eu plus de 400 000 partages sur les réseaux sociaux et l’article a été lu plus de 7 millions de fois sur le site... Aujourd’hui, nous ne sommes pas un simple site à vocation humoristique. Nous savons que les contenus les plus appréciés par les internautes sont avant tout les sujets liés à l’actualité, les causes qui les touchent et qui leur donnent envie d’agir...

L’américain BuzzFeed a fait son arrivée en France. Allez-vous conquérir les États-Unis ?

L’idée fait rêver, pourquoi pas un jour... En France, nous sommes d’ores et déjà leader dans le secteur du divertissement, mais nous sommes encore en pleine croissance. À terme, notre objectif est de renforcer le positionnement de Demotivateur.fr pour en faire un incontournable du paysage médiatique français.

Quel est votre business model ?

Notre audience étant en très forte progression (nous avons fait 40 millions de visites le mois dernier), de plus en plus de marques viennent nous voir pour qu’on les aide à créer des campagnes qui suscitent des réactions et deviennent virales. Ce qui est amusant, c’est qu’on doit leur apprendre à repenser leur approche publicitaire. En effet, sur Demotivateur, il n’y a pas de bandeaux publicitaires comme sur la majorité des sites. Ce qui intéresse les marques, c’est notre communauté, car elles peuvent toucher très rapidement des millions d’ambassadeurs de marque en puissance, et notre job, c’est de les y aider sans que cela fasse "publicitaire". Du coup, on a l’habitude de travailler avec des marques plutôt pionnières dans ce genre d’approche comme Canal+, Oasis, Sony ou même Citroën.

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