MosaikHub Magazine

Peut-on avoir confiance dans les banques de la zone euro ?

lundi 27 octobre 2014

La BCE a tenté de lever les doutes sur l’état du système bancaire en publiant les résultats de son enquête. Les banques françaises ont réussi leur examen.

Peut-on avoir confiance dans nos banques ? Sont-elles en mesure d’accorder des prêts aux entreprises ? Notre argent est-il en sécurité ? Telles sont, en quelque sorte, les questions simples auxquelles la Banque centrale européenne (BCE) a répondu dimanche en publiant les résultats de son opération-vérité, avant de prendre la responsabilité de la surveillance des 130 plus grands établissements de la zone euro, le 4 novembre.

Pour être sûre de ne pas se tromper, l’institution publique de Francfort s’est lancée dans une enquête inédite de plus d’un an, afin de s’assurer que les banques n’essaieraient pas de tricher avec leurs résultats. Avant de simuler des scénarios de crises économique et financière comme en 2011, elle a envoyé des enquêteurs dans chacune d’elles pour éplucher plus de 120 portefeuilles représentant plus de 50 des actifs bancaires. Objectif : s’assurer que tous les établissements appliquent la même méthode pour estimer leur valeur réelle. Outre les habituelles équipes de supervision nationales, la BCE a fait appel à des cabinets d’audit et des consultants, mobilisant parfois jusqu’à 800 personnes en France, par exemple pour voir comment les banquiers comptabilisaient les prêts non performants, c’est-à-dire ceux qui ne se seront jamais remboursés en totalité. "C’est un exercice qui paraissait presque impossible à réaliser tellement il y avait de données à regarder lorsqu’on l’a conçu", a rappelé Christian Noyer, le gouverneur de la Banque de France, lors d’une conférence de presse de présentation des résultats.

13 banques françaises auscultées, une seule recalée

Au final, au 31 décembre 2013, date arrêtée pour effectuer la radiographie des banques de la zone euro, 25 banques sur 130 se sont révélées insuffisamment capitalisées. En d’autres termes, quasiment une sur cinq n’avait pas suffisamment de capital en réserve. Vingt-cinq milliards d’euros supplémentaires leur auraient été nécessaires pour être sûres. Parmi elles figure une seule banque française sur les 13 auscultées. Il s’agit de la très peu connue Caisse de refinancement de l’habitat (CRH).

Mais, que le public se rassure, cela ne veut pas dire que 25 banques seront mises en faillite. Certaines d’entre elles ont pris les devants et se sont déjà adaptées tout au long de l’année 2014. Elles ont levé 15 milliards sur les marchés. C’est le cas de la CRH, qui a réuni deux fois plus d’argent que nécessaire pour se conformer à la réglementation. Au final, seules huit banques européennes, principalement italiennes, grecques ou chypriotes, vont devoir se renforcer*. Elles auront six à neuf mois pour présenter des plans de restructuration crédibles ou lever de l’argent pour "un total inférieur à sept milliards d’euros", selon la Banque de France.

Les grands groupes français (BNP Paribas, BPCE, Crédit agricole, Société générale) apparaissent solides. Première satisfaction pour l’autorité française jusqu’à présent chargée de leur supervision, l’enquête sur leurs actifs a conduit à "des ajustements extrêmement réduits", se félicite Christian Noyer. En clair, les banques françaises étaient déjà très sérieuses dans l’évaluation de leurs risques. L’application d’une méthode commune, établie avec l’aide du cabinet privé Oliver Wyman par la BCE, n’a pas conduit à d’énormes surprises sur leur manière de compter. Alors qu’elles représentaient 30 % des actifs analysés, elles n’ont donné lieu qu’à 12 % des 48 milliards de corrections apportées dans toute la zone euro.

Le modèle de banque universelle conforté ?

Autre motif de satisfaction pour la Banque de France, la bonne résistance des banques françaises au scénario de crise plus sévère que précédemment imaginé par la BCE pour 2014-2015-2016. Dans une telle situation (baisse de plus de 30 % des prix de l’immobilier, remontée des taux sur la dette publique à plus de 3,5 %, effondrement de la croissance, effondrement des marchés...), les banques françaises conserveraient des coussins de sécurité confortables. "Là encore, les banques françaises se situent dans les meilleures positions au sein de la zone euro", a souligné le gouverneur de la Banque de France. De quoi renforcer son idée que le modèle français de banques universelles, assis sur tous les métiers de la banque à la fois, est un bon modèle. Même en cas de scénario défavorable sur l’ensemble de leurs métiers (financement et investissement, banque de détail...), les groupes français se révèlent capables de faire face. "Dans le scénario le plus défavorable, les banques françaises ont passé avec succès le test et se comparent très favorablement avec leurs pairs européens", souligne la Banque de France.

Si l’opération-vérité de la BCE devrait avoir un impact positif via une confiance renforcée dans le système bancaire européen, il ne faut pas en attendre une relance massive du crédit pour autant. "La principale raison de la faiblesse du crédit est un problème de demande, pas seulement en France, mais dans l’ensemble de la zone euro", a bien souligné Christian Noyer. C’est d’autant plus vrai pour la France que l’encours de crédit progresserait déjà aussi vite que le PIB, signe que les banques françaises remplissent correctement leur rôle, à en croire la Banque de France.

* La portugaise BCP, l’autrichienne Österreichische Volksbanken, l’irlandaise TSB, la grecque Hellenic Bank et quatre italiennes, Monte Dei Paschi, Banca Carige, Banco Popolare di Vicenza et Banco Popolare du Milano.


Accueil | Contact | Plan du site | |

Creative Commons License

Promouvoir & Vulgariser la Technologie