MosaikHub Magazine

La BRH lance le BIC, un nouvel outil financier

jeudi 23 octobre 2014

La BRH lance le BIC, un nouvel outil financier. Le crédit est à la croissance ce que le sang est à l’organisme humain. Fort de ce constat, l’Etat haïtien, depuis quelques années, a sonné le ralliement autour d’une série de projets visant la relance de l’économie nationale à travers l’amélioration du climat des affaires, l’inclusion financière, etc. Dans la foulée de cette course vers la croissance, la BRH, associée à la BID et à la SFI, a lancé mardi le Bureau d’information sur le crédit (BIC).

La Banque de la République d’Haïti (BRH), de concert avec la Banque interaméricaine de développement (BID) et la Société financière internationale (SFI), a lancé officiellement mardi en présence du Premier ministre Laurent Lamothe, le Bureau d’information sur le crédit (BIC, un outil moderne qui facilitera une meilleure gestion des risques financiers). Cette entité, mise sur pied par la Banque centrale haïtienne, s’inscrit dans la logique du programme d’inclusion financière tant prônée par l’administration Martelly/Lamothe, en vue de booster l’économie nationale à travers la démocratisation du crédit, la création et le développement des micro, petites et moyennes entreprises.

C’est une salle comble du Karibe Convention Center qui a accueilli le lancement du Bureau d’information sur le crédit (BIC), une structure attendue depuis des lustres dans le paysage entrepreneurial haïtien. L’économie haïtienne est anémiée et l’accès difficile au crédit est l’un des éléments couramment évoqués pour justifier cet état de fait. Conscientes de la situation, les autorités haïtiennes appuyées par des organismes internationaux envisagent les moyens pour pallier ce problème.

Invité à prendre la parole à la cérémonie de lancement du BIC, Le Premier ministre haïtien, Laurent Lamothe, reconnaît que la pénurie du crédit pèse très lourdement sur les micro, petites et moyennes entreprises qui sont les principaux moteurs de croissance économique et de la création d’emplois. C’est pour cette raison qu’il a créé « une commission de travail BRH-Association professionnelle des banques » afin d’identifier et de minimiser les freins structurels à la distribution du crédit.
Dans son souci de mettre en relief à la fois la faiblesse et la mauvaise répartition du crédit dans le système financier haïtien, le chef du gouvernement a expliqué que les prêts accordés dans le pays financent le commerce et les importations à plus de 60 %. Pourtant, l’agriculture qui représente 25 % du PIB ne bénéficie même pas de 1% du crédit.

Laurent Lamothe est persuadé que pour atteindre le niveau régional, le système bancaire devrait accorder des prêts additionnels de plus de 25 milliards de gourdes par rapport au niveau actuel des dépôts bancaires. Le ratio des prêts rapportés aux dépôts étant de 43 % en Haïti alors que la moyenne régionale affiche 65%.

Le BIC déjà opérationnel

Selon les informations fournies par le gouverneur de la banque centrale, Charles Castel, le BIC est déjà opérationnel. Ce Bureau collecte des informations communiquées par les banques sur l’endettement et la solidité des débiteurs. Ces informations constitueront une base de données qui pourra être consultée conformément à la loi du 14 mai 2012 portant organisation des banques et des autres institutions financières », a expliqué le gouverneur de la BRH, qui soutient que la stabilité macroéconomique quoique nécessaire est loin d’être suffisante pour la croissance du produit national.

« Le produit national doit croître fortement et durablement par le développement des activités productives créatrices d’emplois et de revenus pour la population, porteuse d’opportunités de réduire les déficits externes et fiscaux ».

La croissance sans « job » ou la reprise sans « job » est l’un des spectres hideux qui guettent toutes les économies du monde, a constaté le gouverneur de la BRH pointant du droit plusieurs économies, avancées se plaignant d’une reprise non associée à une réduction de chômage, où la croissance n’est pas tirée par la production et l’emploi et reste donc sans grand effet sur les malaises économiques et sociaux.

« Chez nous la croissance démographique complique et exacerbe ces malaises. Nous ne pouvons pas nous payer le luxe d’afficher ni des croissances négatives, ni des croissances qui, même positives, n’induisent pas une forte création d’emplois, a fait remarquer M. Castel.

Le représentant de la Société financière internationale (SFI) en Haïti et en République dominicaine, Ary Naim, définit le rôle d’un bureau du crédit : « c’est essentiellement un organisme centralisateur, qui permet à chaque Haïtien, utilisateur de crédit commercial, de microfinance ou de crédit bancaire de maintenir un historique consolidé de son comportement financier. »

« Qui dit création d’emplois dit investissements, et qui dit investissement dit financement. La reconstruction économique d’Haïti ne passe pas seulement par les grands investissements étrangers, mais tout d’abord par les investissements des PME haïtiennes. Dans les pays émergents en général, 65 % des emplois sont créés par les PME locales », a déclaré M. Naim.

Or, poursuit le responsable de cette filiale de la Banque mondiale, Haïti a environ 10 000 petites et moyennes entreprises et 375 000 microentreprises. La grande majorité de ces entreprises n’ont pour ainsi dire pas accès au crédit formel, et moins d’un tiers des Haïtiens disposent d’un compte bancaire. Selon lui, l’objectif de la stratégie d’inclusion financière du pays est de remédier à cet état de fait.

« La contribution de 1,2 million de dollars de la SFI fait partie du Programme global de soutien au financement des PME, financé par le gouvernement britannique à travers UKAID. De son côté, la Banque mondiale travaille à la mise en place de lois et réglementations appropriées, et la BID apporte une aide de 1 million de dollars à la mise en place du Bureau de crédit », a-t-il informé.

Gilles Damais, chef des opérations de la BID, prenant la parole, a salué le sens du leadership de la BRH à travers la mise sur le pied du projet de création du BIC, un projet appuyé par deux organisations internationales qui y ont contribué de manière coordonnée.

« Cela montre que sous un leadership clair, la coordination des bailleurs de fonds, oui, c’est possible. C’est d’ailleurs le souci de la BID et de la Banque mondiale de coordonner au mieux leurs interventions sous le leadership du gouvernement », a indiqué Gilles Damais, qui a souligné que la contribution de la BID à la création du BIC s’élève à environ un million de dollars. Cet appui financier, a-t-il poursuivi, provient d’un projet d’investissement approuvé en 2012 et intitulé : ‘’Développement du secteur privé à travers la promotion des investissements’’ et mis en œuvre par la BID, la SFI, CFI, le MEF et la BRH.

Les résultats attendus

Les attentes des partenaires de la BRH par rapport au BIC sont légion. En matière de résultats, Gilles Damais dit attendre que le BIC :
- réduise le déficit en informations dont pâtissent les différences sources de financement potentiel des entreprises du pays, notamment les micro, petites et moyennes entreprises ;
- réduise le coût de l’accès à ces informations et le coût de l’organisation de ces informations sur les entreprises. Coût qui peut représenter un investissement majeur et lourd pour des structures de financement.

« Ce faisant, le BIC contribuera à la réduction des coûts d’opération des institutions financières et aura, nous l’espérons, un impact positif sur l’offre en financement et d’autres services financiers pour le secteur des micro-entreprises notamment », estime M. Damais, arguant qu’une information largement disponible et accessible tend à améliorer le taux de remboursement auprès des institutions financières.

D’autre part, en ce qui concerne l’investissement direct étranger, les avantages à disposer d’un bureau d’information sur le crédit sont nombreux :
-  Un BIC favorisera l’établissement d’associations stratégiques entre des entreprises locales et des entreprises étrangères en réduisant les risques d’une telle association pour l’entreprise étrangère…
-  un BIC contribuera également à ce que les bénéfices générés par les entreprises étrangères soient réinvestis dans le pays même à travers le système financier national.

Haïti n’est pas le premier pays à ériger un tel organe, selon Gilles Damais qui a cité les cas du Salvador, du Pérou et de l’Uruguay où la BID a contribué à la mise sur pied d’institutions comparables au grand avantage du climat des affaires qui s’y est vivement amélioré.
« Après le lancement du guichet unique des entreprises, il y a quelques jours, le lancement du BIC constitue un nouveau pas décisif franchi vers l’amélioration du climat des affaires et du contexte pour faire des affaires en Haïti », se réjouit le représentant de la BID, qui mise sur les efforts des parties concernées pour la poursuite du projet tout en assurant la partie haïtienne du ferme appui de la BID.

Dieudonné Joachim et Cyprien L. Gary


Accueil | Contact | Plan du site | |

Creative Commons License

Promouvoir & Vulgariser la Technologie