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Séries de zombies : la contagion

lundi 13 octobre 2014

La cinquième saison de « The Walking Dead » a démarré dimanche, mais la série est désormais concurrencée par d’autres productions qui tentent de profiter du créneau des morts-vivants.

Alors que la saison 5 de The Walking Dead a démarré, dimanche 12 octobre aux Etats-Unis sur AMC et le lendemain en France sur Orange Cinéma Séries, au moins trois séries traitant de revenants sont programmées. Face à cette avalanche de zombies, certains parleront de concurrence, voire de trop plein, d’autres évoqueront une complémentarité entre les différents styles mis à l’écran.

« Z Nation » : dans les pas de « World War Z » ?

Depuis le 12 septembre, la chaîne américaine Syfy diffuse Z Nation. L’intrigue démarre trois ans après la propagation d’un virus qui a transformé les habitants en morts-vivants : un groupe d’humains doit transporter la seule personne immunisée connue à travers tous les Etats-Unis et la conduire au seul laboratoire encore capable de fabriquer un vaccin. Une ambiance post-apocalyptique qui a un goût de déjà-vu.

Les premières minutes de Z Nation présentent une succession de faux reportages qui résument cette situation chaotique pour fondre directement sur les héros déjà en pleine action. Cette technique classique du film catastrophe n’a que peu à voir avec The Walking Dead, dont le pilote, diffusé en 2010, mettait en scène un seul être humain persuadé d’être le seul rescapé – comme dans la bande-dessinée dont la série s’inspire.

Autre différence soulignée par les fans du genre : la production de Z Nation a opté pour des zombies véloces à l’instar de World War Z ou encore 28 Jours plus tard, qui avait lancé la mode.

L’esthétique générale de Z Nation peut ressembler à celle de The Walking Dead : on y retrouve une atmosphère de plomb, des armes, un combo éclectique de survivants poussiéreux et méfiants qui tentent de se rappeler que l’union peut faire la force.

Il n’y a pas non plus de retenue dans le gore. A l’image de The Walking Dead, qui se permet un étalage de violence très crue le dimanche soir en prime-time aux Etats-Unis, Z Nation livre son quota d’hémoglobine. La série montre, sur certains points, davantage de fantaisie que l’œuvre de Frank Darabont et Robert Kirkman : dès le pilote, les spectateurs ont eu droit à l’apparition mouvementée d’un bébé zombie – un peu moins grotesque que celui du film culte Braindead, de Peter Jackson.

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En plus de Z Nation, Syfy a lancé un programme de docu-fiction-série décalé : Town of the Living Dead diffusé le jeudi soir, la veille de Z Nation. Il s’agit de suivre une équipe de réalisateurs bras-cassés qui tentent de produire leur propre film de zombie dans une petite ville de l’Alabama. Ce programme caricatural peine pour le moment à convaincre les fans du genre.

La promesse d’un spin-off

Début septembre, on apprenait qu’AMC a commandé un épisode pilote pour une série dérivée de The Walking Dead prévue en 2015. Une annonce qui n’a rien de surprenant dans la mesure où elle en a fait de même avec Breaking Bad, qui devrait donner le jour à Better Call Saul, un show centré sur l’avocat véreux et délectable de Walter White.
Ce nouveau projet zombie d’AMC n’a pas encore de titre ou de date de sortie. A la base, les rumeurs évoquaient une préquelle, une histoire reprenant des événements antérieurs. Mais la série jumelle devrait se dérouler dans d’autres parties du monde pour satisfaire la curiosité des fans. Le président de la chaîne, Charlie Collier, a assuré qu’il s’agirait d’« une toute nouvelle histoire avec de tous nouveaux personnages », bien que le programme semble reposer sur la même recette de la série chorale et psychologique. Pour travailler sur ce pilote dont le tournage devrait débuter d’ici à la fin de l’année, Robert Kirkman, le père de la bande dessinée et producteur de la série, sera épaulé par Dave Erickson, le producteur de Sons of Anarchy.

Des zombies moins violents

De son côté, CW, une chaîne destinée aux 18-34 ans qui a fait son succès avec Supernatural, prépare l’adaptation du comics autrefois édité par Vertigo (une filiale de DC Comics), iZombie, qui devrait voir le jour début 2015. Liv, une étudiante, se transforme en morte-vivante lors d’une soirée qui tourne mal. Afin d’épargner les humains, elle travaille dans une morgue pour se nourrir des défunts. En consommant la cervelle de ceux-ci, elle hérite de leurs souvenirs et de leurs tourments. Pour les apaiser, elle va résoudre des affaires criminelles avec l’aide d’un détective.

A lire ce synopsis, on penche pour un mélange entre Veronica Mars (dont le créateur, Rob Thomas, est aussi aux manettes d’iZombie), Ghost Whisperer et Vampire Diaries, d’ailleurs l’une des séries phares de la chaîne. Difficile pour autant de savoir si l’héroïne sera la seule zombie du scénario. Les amateurs des films avec des hordes de morts-vivants privés de toute intelligence et attaquant de façon aléatoire risquent de ne pas y trouver leur compte – dans la lignée de la comédie romantique Warm Bodies.

Des drames populaires... et lucratifs

Tous ces projets ne tombent pas par hasard. En quatre saisons, The Walking Dead et ses « walkers » sont devenus extrêmement populaires à la télévision américaine. En avril, le dernier épisode de la quatrième saison a réuni 15,7 millions de téléspectateurs, selon The Hollywood Reporter. Le début de la même saison avait battu des records en dépassant les 16 millions : en comparaison, l’audience moyenne de Breaking Bad était d’environ 10 millions de téléspectateurs par épisode, note le Time.

Après les programmes sportifs liés au football à la télé américaine, The Walking Dead fait partie, avec The Big Bang Theory, des séries télévisées les plus rentables. Trente secondes de spots publicitaires pendant les coupures des épisodes peuvent coûter plus de 400 000 dollars aux annonceurs, rapporte le magazine spécialisé Advertising Age (pour « Big Bang », la même durée est facturée en moyenne 344 827 dollars).

En 2013, à la sortie des tarifs publicitaires des programmes américains, le bimensuel new-yorkais Complex avait sorti sa calculatrice et déduit sommairement qu’à raison de 18 minutes de publicité par épisode et de 2,75 millions dépensés par la chaîne pour un feuilleton de la saga, chaque épisode de The Walking Dead pourrait rapporter 11 millions de dollars.

Et cette rentabilité n’est pas amoindrie par les salaires des acteurs. Andrew Lincoln, qui incarne Rick, le personnage central de Walking Dead, n’aurait touché en 2013 que 90 000 dollars par épisode. Tout comme ses partenaires, il ne figure dans aucun classement des meilleurs salaires d’acteurs. En comparaison, les trois acteurs principaux de The Big Bang Theory ont réclamé un cachet d’un million de dollars par épisode (faisant d’eux les acteurs de série les mieux payés à l’heure actuelle).

Pour occuper le créneau, les nouvelles séries de zombies mettent, chacune à leur façon, des moyens. Les plus réalistes doivent mettre en scène du gore et des morts-vivants au moins aussi effrayants que The Walking Dead (dont les effets spéciaux, trucages et maquillages sont très soignés) tout en s’en démarquant.

connu pour ses séries B et ses mockbusters (des films revisitant à bas coûts des grosses productions hollywoodiennes) à qui l’on doit Sharknado, un film avec des ouragans de requins largement partagé et moqué – mais qui a aussi ses amateurs.

A ce titre, les fans de zombies redoutaient une copie mauvais genre de The Walking Dead, ce dont s’est défendu Karl Schaefer dans une interview pour le site Collider (en anglais) reprise par un site de fans français :

« Le truc avec “The Walking Dead” c’est qu’ils prennent les choses très au sérieux, ils ne les appellent pas “zombies”. Ils ont tout un tas de noms pour les morts mais pas zombies, dans notre série, on voulait un univers où les gens savent ce qu’est un zombie. Ils ont vu des films de zombies, ils ont vu “La Nuit des morts-vivants”. On a donc toutes sortes de zombies et on voulait être la série zombie qui dit “Ouais, on va faire ce genre de zombies”. On a des zombies rapides, des zombies lents, des animaux zombies. On a un ours zombie. On a des bébés zombies, et nos zombies évoluent aussi. »

Nourrir son public

Pour convaincre, les nouvelles productions doivent également s’adresser aux fans de science-fiction et d’horreur voire de teen movies, en multipliant les références.

Le casting de Z Nation est exemplaire dans le genre : y figure Harold Perrineau, qui a notamment interprété Michael Dawson dans Lost mais a aussi joué dans 28 semaines plus tard. Les adolescentes de la fin des années quatre-vingt-dix reconnaîtront peut-être le « Andy McDermott » du Loup-garou de Paris. Tom Everett Scott, avant d’être chasseur de zombies, comptait fleurette à Julie Delpy lorsque la pleine lune ne venait pas contrarier ses plans. DJ Qualls vient compléter les têtes « connues » de Z Nation. L’acteur a été révélé dans le film potache Road Trip et étrenne son style d’éternel nerd adolescent lors de petites apparitions dans différentes séries. Mais aussi Michael Welch, un troisième couteau de la saga Twilight

En haut, les acteurs DJ Qualls, Harold Perrineau et Tom Everett Scott dans des précédentes productions qui ont pu les révéler. En bas, leur prestation dans "Z Nation", la série de zombies diffusée sur Syfy. | DR

De la même façon, avec iZombie, CW espère garder son public de jeunes américains, alors qu’une majorité de l’audimat de The Walking Dead (entre 18 et 49 ans) empiète sur son cœur de cible. La chaîne semble avoir choisi, pour cela, d’adoucir le comics dont elle s’inspire et mis quelques ingrédients plus adolescents, préférant lui donner un style policier, ou d’horreur glamour plutôt que de verser dans le gore pur jus.

Au casting dévoilé en juillet au Comic-Con de San Diego : Rose McIver, David Anders (ancien « vilain » de Heroes et de… Vampires Diaries) ainsi que Robert Buckley (alias Clayton dans Les Frères Scott). Des choix assez éloignés de ceux de The Walking Dead.

Pauline Croquet
Journaliste au Monde


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