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10 octobre 1683. Depuis la veille, Louis XIV est remarié avec la vieille bigote de Mme de Maintenon.

jeudi 9 octobre 2014

Veuf depuis seulement trois mois, le Roi-Soleil épouse en douce l’ex-gouvernante des enfants qu’il a eu avec la Montespan

Frédéric Lewino et Gwendoline Dos Santos

Le vieux roi-soleil ne perd pas de temps. Au diable un deuil trop long, comme le dirait Hollande ! Marie-Thérèse n’est pas morte depuis trois mois qu’il se remarie avec Madame de Maintenon, née Françoise d’Aubigné, veuve du poète Paul Scarron. Pour le Roi-Soleil, épouser une veuve de basse extraction c’est aussi incongru que deux ministres s’envoyant en l’air entre deux conseils.... Pourtant, il s’agit bien de la triste réalité qui fait pleurer de rage Louvois. Celui-ci ne supporte pas de voir son souverain épouser la fille de Constant d’Aubigné, assassin et traitre à sa patrie. Quelle déchéance !

Après une petite enfance passée en Martinique, la jeuneFrançoise d’Aubigné se morfond plusieurs années dans un couvent parisien dont elle parvient à s’échapper à l’âge de 16 ans en épousant le vieux poète Paul Scarron, 41 ans. Contrefait et fêtard, ce n’est pas exactement l’époux qu’il faut à la douce jeune fille. Mais celle-ci se trouve bientôt à l’aise pour animer le salon de son époux qui reçoit les plus beaux esprits de l’époque : Madame de Sévigné, Madame de La Fayette, Ninon de Lenclos, et, surtout, la superbe Françoise-Athénaïs de Montespan. En 1669, devenue la favorite de Louis XIV, Madame de Montespan demande à l’amusante et discrète Mme Scarron, devenue veuve, de devenir la gouvernante du nourrisson qu’elle vient d’avoir du roi.

Amitié

Fin mars 1670, la maîtresse royale accouche une deuxième fois, à Saint Germain en Laye. La bonne veuve accourt pour récupérer l’enfant et le placer chez une deuxième nourrice. La voilà maintenant à courir d’une maison à l’autre. Deux ans plus tard, la fillette aînée meurt d’un abcès à la tête. Comme Françoise d’Aubigné verse de grosses larmes, Louis XIV confie à un courtisan : "Comme elle sait bien aimer, il y aurait du plaisir à être aimé d’elle." Bientôt, un troisième enfant s’annonce. Comme le roi part guerroyer en Hollande, il envoie sa favorite, la gouvernante et les enfants séjourner au château du Génitoy, près de Lagny. Il pensait d’abord les envoyer au château de Souzy-la-Briche, mais Anne Pingeot et sa file Mazarine y séjournaient déjà... À son retour, le roi fait installer ses enfants illégitimes et Madame de Maintenon dans une superbe demeure du village de Vaugirard qu’il visite fréquemment, car, aussi curieux que cela paraisse pour un roi, il aime ses petits bâtards.

Madame de Montespan est une véritable pondeuse. En huit ans, elle donne le jour à encore six enfants, tous du roi. Lequel rend souvent visite à ses rejetons pour qui il a une réelle affection. Il apprend à apprécier la gouvernante de ses petits. Progressivement, un sentiment d’amitié se développe entre ces deux êtres pourtant si opposés, entre le roi jouisseur et la sérieuse veuve Scarron.

Louis XIV se range

En janvier 1674, le roi reconnaît officiellement ses bâtards, qui peuvent donc s’installer à Versailles avec leur nourrice. Progressivement, les liens se resserrent entre Louis XIV et Françoise Scarron. Il semble qu’elle lui résiste plusieurs années avant de céder à ses avances vers 1674. En 1680, après l’affaire des Poisons où elle est impliquée, Madame de Montespan doit laisser le pas à une nouvelle favorite, Mademoiselle de Fontange, sans pourtant être totalement éclipsée. En fait, ce gros dégoûtant les garde toutes deux. Mais cette vie de bambocheur commence à le fatiguer. Contrairement à DSK, sa vigueur vacille avec l’âge. Le Roi-Soleil désire se ranger. Il écoute davantage son confesseur et les autres grenouilles de bénitier de la cour qui ne cessent de fustiger son comportement. Son amie Madame de Maintenon le travaille au corps pour le ramener dans le giron de l’Église sur le chemin de la morale, tout en continuant à partager sa couche à l’occasion. Cependant, elle convainc le roi de renvoyer la Montespan pour se rapprocher de la reine. Ce qu’il fait dès 1681, n’affichant plus de favorite officielle. En juillet 1683, Marie-Thérèse meurt par la faute de ses médecins.

Le Roi-Soleil envisage alors d’afficher Madame de Maintenon comme sa nouvelle favorite, mais celle-ci refuse de vivre dans le péché. Comment sortir de l’impasse ? C’est le père La Chaise, confesseur du roi, qui suggère le mariage. Mais comme la marquise a quasiment été ramassée dans le ruisseau, il ne peut être envisagé qu’un mariage secret, dit morganatique. Françoise sera l’épouse de Louis aux yeux de Dieu, mais pas reine de France. Ainsi pourront-ils partager la même couche sans encourir les foudres de Dieu.

Surpris au lit

Le mariage se déroule le 9 octobre au soir, dans la chapelle de Versailles. Très peu de personnes sont mises dans la confidence. Louvois, qui désapprouve l’union, tout comme le Dauphin, qui méprise cette parvenue. On essaie, en vain, d’acheter son consentement avec la légitimation de la petite bâtarde que sa favorite Mademoiselle de La Force lui a donnée. Peu importe, le roi épouse la veuve Scarron. La cérémonie est célébrée par monseigneur Harlay de Champvallon assisté du père La Chaise. Les témoins sont le valet de chambre du roi et le marquis de Montchevreuil, gouverneur du duc du Maine. À l’époque, on appelle cela un mariage "de conscience", reconnu par l’Église, mais sans effet civil. Le 11 octobre, Madame de Maintenon écrit à son amie Madame de Brinon : "Je meurs d’envie de vous voir mais je ne puis vous dire quand ce sera : je n’ai pas encore eu le temps de me reconnaître."

Personne d’autre à la Cour n’est mis au courant. Seul un oeil attentif constate une légère modification du comportement de madame "Soleil". Elle ne se lève plus qu’en présence des membres de la famille royale. Qui d’autre que l’épouse du roi pourrait se le permettre dans une cour où l’étiquette prime tout ? Elle se permet même d’appeler affectueusement la dauphine "Mignonne". Une familiarité impensable pour toute autre. En 1686, le roi lui octroie un appartement en face du sien et s’y rend souvent le soir pour discuter avec ses ministres du gouvernement de la France. Quand il se fait tard, les femmes de chambre de la marquise la déshabillent devant le souverain. Un jour, le frère du roi surprend celui-ci à moitié à poil, et peut-être même avec une semi-érection, dans le lit de ladite Maintenon. Le souverain s’excuse presque : "De la manière dont vous me voyez avec madame, vous pensez bien ce qu’elle m’est..."

Le libertin se fait dévot

Un jour de 1691, Louis XIV dit à Louvois qu’il en a marre de ces cachotteries et voudrait officialiser son mariage, ce qui ferait de Madame de Maintenon la reine. Louvois est sonné. Autant que le jour où il apprend que Sarkozy est fait cocu par un publicitaire. Il tombe à genoux devant son roi, lui tend son épée pour lui demander de le tuer afin de ne pas assister au déshonneur de son souverain. Celui-ci finit par céder à son ministre. Son union restera secrète. Quelques semaines plus tard, Louvois se sentira mal dans la chambre de Madame de Maintenon en train de converser avec le roi. Il meurt quelques heures plus tard à la surprise générale. D’où la rumeur d’un empoisonnement confirmé par Saint-Simon. La vengeance de l’épouse du roi ?

En tout cas, celle-ci finit par faire du libertin un roi dévot et chiant à mourir. Fini les fêtes, les bals et les concerts. Madame de Maintenon demande à Racine de reprendre la plume pour écrire des tragédies emmerdantes comme la pluie. Le seul plaisir que se donne encore le roi, c’est celui du sexe avec son épouse secrète. Ce dont elle se plaint à son confesseur le père La Chaise. Son ennemie intime, la princesse Palatine, écrit à sa famille : "Il couche avec sa vieille tous les après-midi." Elle écrit encore : "Elle n’est pas si folle que de se faire déclarer reine, elle connaît trop bien l’humeur de son homme... Si elle faisait cela, elle tomberait bien vite en disgrâce et serait perdue." Bref, le règne de Louis XIV, qui avait commencé dans le libertinage, s’achève dans la bigoterie. Terne fin pour le Roi-Soleil.

C’est également arrivé un 10 octobre

1985 - Orson Welles est victime d’une crise cardiaque, à 70 ans.

1963 - Décès d’Édith Piaf à Grasse, à 47 ans.

1935 - Première de l’opéra Porgy and Bess, à Broadway

1933 - Waldo L. Semon reçoit un brevet pour la fabrication du PVC, appelé aussi vinyle.

1903 - L’aspirine est mise en vente en Allemagne.

1901 - Naissance d’Alberto Giacometti, peintre et sculpteur suisse.

1886 - Aux États-Unis, James Potter invente le smoking.

1869 - John Wesley Hyatt invente une boule de billard dans un matériau se substituant à l’ivoire.

1794 - Création du Conservatoire national des arts et métiers par l’abbé Grégoire.

1789 - Le docteur Joseph Guillotin propose une machine qui se substituerait à la main du bourreau.

1780 - Un grand ouragan tue 27 500 personnes aux Antilles.

1684 - Naissance du peintre Antoine Watteau.

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