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L’ancien dictateur haïtien dit "Bébé Doc" meurt sans avoir été jugé

lundi 6 octobre 2014

L’ancien dictateur haïtien Jean-Claude Duvalier, dit "Bébé Doc" et qui avait dirigé son pays d’une main de fer avant de s’exiler en France, est mort samedi à Port-au-Prince avant que son pays ait pu le juger pour crimes contre l’humanité.

"La famille nous a téléphoné ce matin pour envoyer un hélicoptère-ambulance après son malaise cardiaque, nous n’avons pas eu le temps de le transporter, on a essayé de donner des soins sur place puis on a constaté le décès", a déclaré à l’AFP la ministre haïtienne de la Santé Florence Guillaume Duperval.

Dans une première réaction, le président haïtien Michel Martelly s’est dit "attristé" par le décès de Jean Claude Duvalier et il a adressé ses condoléances "à sa famille, à ses proches et à ses partisans à travers le pays".

Jean-Claude Duvalier, 63 ans, dont les avocats soulignaient régulièrement la frêle santé, vivait retiré dans un quartier huppé des hauteurs de Port-au-Prince depuis son retour surprise au pays en 2011.

Il avait été surnommé "Bébé Doc", après avoir hérité du pouvoir de son père François Duvalier en 1971, à l’âge de 19 ans. Il s’était alors déclaré président à vie avant d’être renversé en 1986 par une révolte populaire soutenue par la communauté internationale.

Comme son père, Jean-Claude Duvalier a dirigé son pays d’une main de fer, muselant l’opposition, arrêtant les dissidents en s’appuyant sur la milice paramilitaire des "Tonton Macoute".

Jean-Claude Duvalier était revenu à la surprise générale en Haïti en 2011 après avoir passé 25 ans en exil en France. Accueilli par de nombreux partisans nostalgiques, il avait alors déclaré être revenu pour "aider le peuple haïtien".

- Aucun procès -

Depuis son retour, de nombreuses plaintes ont été déposées contre lui, pour arrestations illégales, tortures, emprisonnements et exil forcé de ses opposants mais aussi détournements de fonds lors de ses quinze années à la tête du pays le plus pauvre des Amériques.

Aucun procès n’a pu être organisé jusque-là.

En janvier 2012, un juge d’instruction avait ordonné son renvoi devant un tribunal correctionnel pour détournements de fonds, mais n’avait pas retenu les poursuites pour crimes contre l’humanité, estimant les faits prescrits.

Cette décision avait provoqué l’indignation des organisations de défense des droits de l’homme et des victimes qui avaient fait appel. En février de cette année, ils obtenaient une première victoire, obtenant de la justice haïtienne l’ouverture d’une nouvelle enquête.

Un juge haïtien estimait que "les actes reprochés à M. Duvalier constituaient des crimes contre l’humanité et étaient, de par leur caractère continu, imprescriptibles". Il jugeait qu’il existait de "sérieux indices relatifs à la participation indirecte et à la responsabilité pénale de Jean-Claude Duvalier".

Concrètement, la justice a chargé un nouveau juge d’instruction de recueillir de nouvelles informations auprès des plaignants et d’interroger des anciens dignitaires du régime.

A l’issue de cette enquête, décision devait être prise de poursuivre ou non l’ancien dictateur.

Les avocats de Jean-Claude Duvalier ont dénoncé une "monstruosité juridique" et porté un recours devant la Cour de Cassation pour s’opposer à l’ouverture de cette nouvelle enquête.

Après plusieurs refus de comparaître, Jean-Claude Duvalier s’était présenté pour la première fois devant la cour d’appel de Port-au-Prince en février 2013. Il avait alors recueilli les applaudissements nourris de ses partisans réunis dans la salle d’audience en déclarant "avoir fait le maximum pour assurer une vie décente à (ses) compatriotes" durant ses années au pouvoir.

"A l’époque, le gouvernement gérait la misère mais les entreprises publiques fonctionnaient bien (...) et les Haïtiens envoyaient leurs enfants à l’école. Je ne peux pas dire que la vie était rose mais les gens vivaient décemment", avait-il fait valoir.

"A mon retour, j’ai trouvé un pays effrondré et rongé par la corruption. (...) C’est à mon tour de demander : qu’avez-vous fait de mon pays ?", s’était-il alors exclamé


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