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14 septembre 1927. La danseuse Isadora Duncan est étranglée par son châle sur la promenade des Anglais

samedi 13 septembre 2014

Lors du démarrage foudroyant de l’Amilcar, l’écharpe se coince dans la roue arrière, rompant la nuque de la célèbre danseuse de 50 ans.

Quelle horrible coïncidence ! Avoir bâti un succès international sur une danse enveloppée dans des voiles et périr, la nuque rompue par son châle. C’est la vengeance des accessoires. Le drame se produit, le 14 septembre 1927, quand Isidora Duncan a déjà commencé à "baisser le pied" : à 50 ans, elle danse moins et enseigne davantage. Depuis la mi-août, la célèbre danseuse américaine réputée pour sa danse libre et spontanée, adepte de l’amour libre, bisexuelle, communiste (ce qui lui a fait perdre la nationalité américaine), excentrique, féministe, darwiniste et bien d’autres choses encore, habite Nice. Malgré son âge, elle conserve un enthousiasme d’adolescente, multipliant les liaisons amoureuses, souvent avec des garçons plus jeunes. Demi Moore aurait pu lui refiler deux ou trois boyfriends bien saignants...

Ce soir-là, elle dîne au restaurant avec son amie Marie Desty, celle qui lui a justement fait cadeau du châle. Elles achèvent leur repas quand un jeune garagiste, Benoît Falchetto, vient chercher Isadora pour lui faire essayer une petite bombe roulante, une Amilcar GS 1924 qu’elle envisagerait de s’offrir. La voiture est bien une Almicar, et pas une Bugatti, comme il a été dit plus tard. En fait, Bugatti est le surnom donné à Falchetto par Isidora, d’où la confusion.
"Je pars vers l’amour"

Lorsque la danseuse s’apprête donc à quitter le restaurant avec son jeune ami, son amie Desty est prise d’un sombre pressentiment. Elle la supplie de renoncer à sa sortie, mais celle-ci rit de ses appréhensions, s’écriant : "Je pars vers l’amour." C’est que la cougar aux pieds nus compte bien croquer le petit mécanicien après la balade. Sa vieille copine Amanda Lear l’approuverait à cent pour cent. Petite anecdote : aux journalistes venus lui demander les derniers mots d’Isadora, Desty n’ose pas leur répéter la phrase trop allusive, la transformant en : "Adieu, mes amis. Je vais à la gloire."

Émoustillée par la perspective de sa soirée, Isadora s’assoit sur le siège passager de la voiture décapotable. Elle prend soin d’enrouler son long châle autour de son cou, lui faisant faire deux tours, avant de rejeter d’un geste machinal les deux extrémités derrière elle. Elle ne s’aperçoit pas que les franges se sont glissées entre le pare-boue gauche arrière et la carrosserie. Le piège est en place. Quand la voiture démarre, le châle s’enroule autour du moyeu en tirant brutalement Isadora Duncan en arrière. Le corps de celle-ci effectue une figure chorégraphique inédite : le salto arrière avec plaquage sur la chaussée. Isadora meurt sur le coup, la nuque brisée. Effrayé, Falchetto freine immédiatement, se précipite vers le corps. Paniqué, il découvre un visage si tuméfié qu’il lui fait penser à celui de Johnny aujourd’hui, et une colonne vertébrale brisée. Ainsi périt, assassinée par un châle, celle qui illumina le monde par sa danse, sa grâce et sa beauté.

La mort aux trousses

Ce n’est pas la première fois qu’une voiture brise la vie d’Isadora. Quatorze ans auparavant, une autre automobile noie ses deux enfants, Deirdre, 6 ans, et Patrick, 3 ans, avec leur nounou. Roulant sur les quais de la Seine, à Paris, le chauffeur cale en voulant éviter un obstacle. Faute de démarreur électrique, il descend du véhicule pour tourner la manivelle. Seulement, cet imbécile oublie de mettre au point mort et de serrer le frein à main. Dès que le moteur se met à tourner, la voiture bondit en avant, dévale le boulevard Bourdon avant d’achever sa course dans la Seine. La nounou et les deux enfants se noient. Ceux-ci étaient de deux pères différents, car Isadora avait des moeurs aussi libres que sa danse. Deirdre a été conçue avec un décorateur de théâtre, tandis que Patrick provient d’une petite graine implantée par Isaac Merritt Singer, l’inventeur de la machine à coudre.

Et la mort reste aux trousses d’Isadora avec le suicide de son époux, le poète russe Sergueï Essenine. Encore une folle histoire d’amour. Elle rencontre Sergueï en octobre 1922, quand elle s’installe à Moscou pour pratiquer son art chez les bolcheviques qu’elle encense. De 18 ans son aînée, elle l’épouse le 2 mai 1922. Mais le poète alcoolique devient violent. Ses crises conduisent à la rupture du couple en mai 1923. Essenine rentre à Moscou. Il tombe dans une profonde dépression l’obligeant à une hospitalisation. Il se remarie, puis se pend le 28 décembre 1925 à l’hôtel d’Angleterre à Leningrad (actuellement, Saint-Pétersbourg). À moins qu’il n’ait été suicidé par des agents de la police secrète...

Isadora a encore une brève aventure avec l’aviateur Roland Garros en septembre 1918. Elle le rencontre à Paris chez une amie. Il se met au piano, elle se met à danser. "Il me ramena à pied de Passy à mon hôtel du Quai d’Orsay. Il y eut un raid aérien, que nous regardâmes en spectateurs, et pendant lequel je dansai pour lui sur la place de la Concorde - lui, assis sur la margelle d’une fontaine, m’applaudissait, ses yeux noirs mélancoliques brillant du feu des fusées qui tombaient et explosaient non loin de nous. Il me dit cette nuit qu’il ne pensait qu’à la mort et ne souhaitait qu’elle. Peu après, l’ange des héros l’a saisi et l’a transporté ailleurs." Isadora Duncan continue à papillonner jusqu’à ce triste jour où son châle décide de l’assassiner avec la complicité d’une Amilcar. Tirons une double leçon de cette mort : ne jamais porter une longue écharpe dans une voiture de sport décapotable et se méfier des amants trop jeunes.
C’est arrivé aujourd’hui

2007 - Décès de Jacques Martin à l’âge de 74 ans.

1987 - Jean-Marie Le Pen déclare que « l’existence des chambres à gaz, dans les camps de concentration nazis, est un point de détail de l’histoire de la Seconde Guerre mondiale ».

1982 - Décès de Grace de Monaco, à l’âge de 52 ans, lors d’un accident de voiture.

1959 - Jacques Brel enregistre chez Philips avec Rauber et son orchestre La valse à mille temps et Les Flamandes.

1901 - Après l’assassinat de William McKinley, Theodore Roosevelt devient le 26e président des États-Unis.

1866 - Alphonse Daudet publie La chèvre de monsieur Seguin dans L’Événement, conte qui aurait été écrit par Paul Arène.

1774 - Casanova, gracié par les Inquisiteurs, retrouve Venise.

1509 - Un séisme tue 13 000 personnes à Istanbul.

1485 - Le doge de Venise Giovanni Mocenigo meurt de la peste.

1321 - Décès de Dante Alighieri, poète, homme politique et écrivain florentin, auteur de La divine comédie.


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