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Des billets d’avion plus chers pour l’Asie ? Merci, Poutine !

mercredi 10 septembre 2014

En réponse aux représailles économiques, la Russie menace de provoquer une grosse augmentation des prix des liaisons aériennes commerciales vers l’Asie.

Si Poutine met sa dernière menace à exécution, les hôtels et restaurants d’Anchorage (charmant comptoir perdu d’Alaska, mais piste d’atterrissage historique des avions longs-courriers à destination de Tokyo) vont pouvoir se réjouir... Et les crabes royaux, mets particulièrement recherché des Européens, devront se cacher en espérant un retournement rapide de la conjoncture géopolitique. Après avoir été boudée pendant des années, l’escale d’Anchorage sur la route du pôle risque en effet de récupérer la clientèle des équipages et des passagers des vols commerciaux en route pour le Japon ou d’autres destinations asiatiques.

Ce pourrait, en tout cas, être l’une des premières conséquences de la décision, pas encore prise, mais dont le Premier ministre russe Medvedev a laissé entendre qu’elle tentait bien Moscou : interdire l’espace aérien de la Sibérie aux 1 600 vols commerciaux européens qui l’empruntent chaque semaine, en raccourcissant ainsi d’un tiers leur route vers l’Asie. Ce serait, estiment les Russes, une réponse du berger à la bergère, pour le nouveau train de sanctions économiques pris par les Européens en rétorsion de l’attitude de Moscou dans la crise ukrainienne.

200 millions de taxes

Autrefois, en effet, et notamment pendant la guerre froide, les vols d’Air France, de la Lufthansa ou de British Airways à destination de l’aéroport de Narita étaient contraints de faire une escale en Alaska, sur une route de plus de 15 000 kilomètres. Puis la Russie, oubliant l’espionnite, qui en principe n’avait plus lieu d’être puisqu’on était à nouveau entre alliés, a consenti à des accords de survol de son espace aérien. Ceux-ci étaient d’ailleurs dans son intérêt puisqu’ils génèrent pour Aeroflot entre 180 et 200 millions de dollars de taxes payées par les compagnies qui empruntent le couloir sibérien. Cette nouvelle donne a permis aux compagnies aériennes européennes, de leur côté, de faire des vols directs en une douzaine d’heures pour Tokyo et de baisser sensiblement le prix des billets pour les îles japonaises (environ 400 euros l’aller en classe éco sur Air France aujourd’hui).

Si la route de la Sibérie était fermée demain, il resterait deux options aux compagnies européennes : la route du Pôle ou la route des Indes. Mais si la seconde solution est plus rapide, elle est à la fois très encombrée et oblige également, pour des raisons de conflits, à éviter certaines zones (Irak, Syrie). Reste donc le passage par le nord, avec au moins cinq heures de vol supplémentaires pour rejoindre la capitale japonaise. Et un surcoût que la plupart des compagnies, et en particulier Air France, seraient contraintes de répercuter sur leurs passagers.

Un mince espoir : il y a deux ans, devant la volonté de la Commission de Bruxelles de taxer les compagnies aériennes sur les émissions de gaz à effet de serre pour les vols venant ou allant en Europe, Poutine avait déjà menacé d’interdire le survol de la Sibérie. Finalement, il n’avait pas été poussé à recourir à cette mesure très pénalisante... parce que les Européens avaient renoncé à leur projet. Pourquoi ne pas espérer qu’avant la mise à exécution de ses menaces, une attitude moins agressive de sa part permette de lever les sanctions européennes. Et donc d’écarter l’ultimatum russe. On peut toujours rêver.


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