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La chute du mur et l’ultime pied de nez aux grepos

dimanche 9 novembre 2014

9 novembre 1989. Lorsqu’il apprend que le mur est en train de tomber, Thierry Noir se rend à Checkpoint Charlie, le poste-frontière le plus emblématique. Là, il voit Mstislav Rostropovitch jouer devant la foule une suite de Jean-Sébastien Bach. Tout le monde n’a pas reconnu le grand violoncelliste russe… et certains lui lancent des pièces. Pour le Français, la chute du mur entraîne, de fait, la destruction de son œuvre. Cela ne l’empêche pas de vivre l’événement comme la fin d’une absurdité : « Enfin, je pouvais emmener ma fille au jardin d’enfant dans ce parc jusqu’alors inaccessible et pourtant juste en face de chez moi. »

Si le mur, en tant que symbole, est tombé en une nuit, les plus de 40 kilomètres de béton, eux, vont mettre des mois à être démantelés. Sous les coups de pioche des Berlinois, cependant, des passages apparaissent. L’occasion est trop belle pour Thierry Noir : le voilà qui passe de l’autre côté pour peindre sur l’autre versant du mur, complètement vierge celui-là, et pour cause, il se situe sur l’ancienne « piste de la mort ». Il tient sa revanche : « Les grepos étaient toujours là mais ils n’avaient plus le droit de tirer. Ils étaient rouges de colère. »

« Il fallait être un étranger pour oser faire ça »

Tout à leur joie de faire tomber « le monstre », les Allemands n’ont pas compris tout de suite qu’il était, malgré tout, un bout de leur histoire. Des pans entiers de mur ont été réduits en poussière, d’autres ont été récupérés et vendus à des sommes folles… à l’étranger. Où sont passés les morceaux de mur peints par Thierry Noir ? « Au Cap-Ferrat, à Tokyo, à Los Angeles, à Mexico… », répond l’intéressé, résigné.

Ironie du sort, celui qui peignait le mur en espérant sa chute dans les années 80 se bat, désormais, pour sauver ce qu’il en reste à Berlin. Un projet immobilier est, en effet, en train de sortir de terre derrière la East Side Gallery, ce mémorial du souvenir au cœur de la ville.

« La East Side Gallery est située à un endroit convoité… mais derrière mes peintures, des gens sont morts, rappelle Thierry Noir. Si on oublie son passé, il peut revenir plus tard, en pleine figure. »


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