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Henri Bazin, homme honnête, est mort

mercredi 5 août 2015

Alité depuis quelques semaines, l’économiste, le professeur d’université, l’ancien ministre de l’Economie et des Finances, l’homme de bien et de culture Henri Bazin s’est éteint chez lui à Turgeau, vers dix heures du soir, le 4 août 2015. Né à Saint-Marc, élevé et éduqué entre Limbé, Gros-Morne et Port-au-Prince, avant de partir poursuivre des études supérieures en Europe, Henri est le fruit des œuvres de Simone et de Louis Bazin, avocat, substitut du commissaire du gouvernement, plus tard sénateur et président du Sénat de la République. Dans la famille, il est celui qui fait le pont : ses parents auront deux fils avant lui et trois filles après lui. Interrogé pour Le Nouvelliste sur son âge en mai 2014, il aura cette phrase : « Mon âge ? Je ne le dirai pas ! » Avant de confier, sans aucune fausse modestie, « Je n’aime pas parler de moi ». Fondateur de l’Association des économistes haïtiens (AEH), il sera deux fois président de ce regroupement de professionnels. Il en démissionnera pour devenir ministre de l’Economie et des Finances en 2004. Le 23 avril 2012, il a été intronisé dans le panthéon de la finance haïtienne en compagnie de Gladys Coupet par la Banque de la République d’Haïti et le Group Croissance, lors de la deuxième édition du colloque sur la finance et la technologie appliquée. Étudiant de la Faculté de droit et des sciences économiques en 1954, avocat et économiste, colauréat de sa promotion, c’est comme boursier de l’État qu’Henri Bazin quitte le pays en 1957 pour parfaire sa formation en Europe. Il ira jusqu’au doctorat. Henri Bazin ne reviendra au pays qu’en 1991 après une longue et belle carrière de fonctionnaire international en Afrique, en Europe et aux Etats-Unis d’Amérique comme conseiller de gouvernements ou membre d’organisations internationales. Il faut dire qu’entre Haïti et lui, se dressera le régime des Duvalier. Marié à la militante féministe Danielle Tardieu, veuf, père d’une fille de 28 ans, il concédera à Roberson Alphonse en mai 2014 qu’il « n’était pas un bourreau des cœurs ». « Marc, c’était le caïd », dira-t-il de son frère, homme d’Etat, aujourd’hui disparu. Très tôt, Henri Bazin est piqué par le virus de l’enseignement qui est dans sa famille, sa sœur Colette enseigne depuis plus de 50 ans. S’il débute à l’Ecole nationale d’administration du Mali, à Bamako, il sera professeur en Haïti à l’Université Jean Price Mars, à l’Académie Nationale Diplomatique et Consulaire, à l’Université Notre-Dame (Cap-Haïtien) ainsi qu’à l’Université d’Etat d’Haïti (Faculté de Droit et des Sciences Economiques du Cap-Haïtien) et au Centre technique de planification et d’économie appliquée (CTPEA) de l’Université d’Etat d’Haïti (UEH). Toujours disponible pour un conseil ou une conférence, il ne court pas le cachet. Son souci est de restituer ce qu’il a reçu de la nation, lui l’ancien boursier de l’Etat haïtien. Et il le dira souvent : « Nous ne rendons pas assez » en référence à ceux qui comme lui ont bénéficié des largesses de cet Etat qui ne fut jamais riche pour se former sans frais. Président du conseil d’administration de la Chambre de Conciliation et d’Arbitrage d’Haïti (CCAH), une institution qui aide le secteur privé à résoudre ses différends, membre du conseil d’administration de Haïti Tec, une institution de formation professionnelle, auteur de l’ouvrage « Le secteur privé haïtien à l’orée du troisième millénaire : enjeux et perspectives », Henri Bazin n’a jamais cessé jusqu’à ses tous derniers jours en pleine forme de militer pour un pays meilleur. Homme de culture et bon vivant, Henri Bazin traînait sa démarche reconnaissable dans toutes les bonnes affiches du pays. Il ne ratait pas une sortie et on le retrouvait souvent en compagnie de sa sœur Evelyne et de ses proches dans les restaurants, les spectacles et même les bals. En mai 2014, dans un article de Roberson Alphonse qui tentait de tirer son portrait, il a dit ce qui était devenu son credo : « Le pays mérite mieux », il faut « être honnête, surtout quand on s’occupe des biens publics ». Grand ami du Nouvelliste, souffrant, Henri était présent à la dernière édition de Livres en folie. C’est à cette occasion que je l’ai vu pour la dernière fois. A sa façon, attentionné et discret, il veillait sur moi, prenait des fois de son temps pour s’entretenir de moi avec Max Chauvet et pour prodiguer avis et recommandations. Un homme de bien, un homme de culture, un homme honnête nous quitte. Toutes nos condoléances à sa famille, à ses amis, à ses proches et à ses étudiants.


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