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Des manquements dans l’utilisation du « Fonds Uruguay », constate L’IGF

mardi 31 mars 2015

Après que l’utilisation du « Fonds Uruguay », ce don de 3.47 millions de dollars accordé par l’Uruguay au gouvernement haïtien, a provoqué beaucoup de vagues dans l’opinion, et aussi l’interpellation par le Sénat de l’ex-ministre des Affaires étrangères Pierre-Richard Casimir, l’Inspection générale des finances (IGF), sur la demande du Ministère de l’Économie et des Finances (MEF), a réalisé une mission de vérification de la conformité de l’utilisation de ce fonds. Dans ce rapport, l’IGF constate que les fonds alloués aux bénéficiaires ont été utilisés effectivement pour la réalisation des activités indiquées, mais toutefois, souligne certains manquements dans les mécanismes et procédures de réception, de répartition et d’exécution des dépenses.

En date du 25 mars 2013, le Ministère des Affaires étrangères (MAE) a été informé de la disponibilité du Fonds sur le compte de la Mission permanente de la République d’Haïti auprès des Nations unies. Ce don a été accordé dans le but de remplir les engagements pris par le gouvernement de l’Uruguay lors de la conférence des bailleurs le 31 mars 2010 à New York à la suite aux dégâts causés par le séisme du 12 janvier 2010. Quelques jours plus tard, le 9 avril 2013, une correspondance du chancelier informe le Premier ministre d’alors, Laurent Lamothe, que le fonds a été réparti, conformément à ses instructions, pour la réalisation de plusieurs projets.

Deux ans plus tard, dans un souci de renforcement de la gestion des fonds publics par la promotion de la transparence, l’IGF, dans une correspondance en date du 8 janvier 2015, a transmis à l’ancienne ministre de l’Économie et des Finances, Marie Carmelle Jean Marie, son rapport de mission portant sur la « vérification de la conformité des dépenses effectuées à partir des ressources fournies par le gouvernement de l’Uruguay. »

D’après le document, cette mission de vérification, réalisée en juin 2014, a permis à l’équipe de l’IGF de rencontrer les principaux bénéficiaires et gestionnaires du « Fonds Uruguay ». Il s’agit du ministère des Affaires étrangères, du ministère de la Culture, de l’Institut de la sauvegarde du patrimoine national (ISPAN) et de l’Unité de construction de logements et de bâtiments publics (UCLBP).

Ainsi, 3.22 millions de dollars sur un total de 3.47 millions alloués aux institutions susmentionnées ont été effectivement utilisés pour la réalisation des projets initialement prévus. « Les dossiers analysés sont globalement conformes, sauf les dossiers pour lesquels des pièces justificatives suffisantes n’ont pas pu être présentées », atteste l’IFG.
Dans le cas du MAE qui a reçu en total 1.2 million de dollars pour, entre autres, l’ouverture de missions diplomatiques et postes consulaires, des dépenses institutionnelles et l’organisation de la 68e Assemblée générale des Nations unies, l’analyse des dépenses par l’IGF révèle que 99.59% desdites dépenses sont conformes. Pour le reste, l’IGF déclare que « des factures [sont] à soumettre pour supporter les montants décaissés et que les pièces justificatives [sont] non suffisantes pour attester l’effectivité du service fourni. »

Même constat pour l’ISPAN dont une infirme partie de ses dépenses ne sont pas supportées par des pièces justificatives. En effet, 97.84% des 300 000 dollars octroyés à l’institution pour la rénovation du Palais aux 365 portes ont été dépensés conformément aux principes et normes régissant la comptabilité publique, constate l’IGF.

Quant à l’UCLBP, qui a reçu la plus grosse part de ce fonds, soit 1.8 million de dollars, pour l’embellissement du quartier de Jalousie à travers le projet « Jalousie en couleurs », les remarques de l’IGF vont en ce sens : absence de pro forma comparatif dans les dossiers d’acquisition de certains biens et signature de contrats de services ou de travaux directement entre les contractants et l’UCLBP sans le visa de la Cour supérieure des comptes et du contentieux administratif (CSC/CA).
Un peu plus loin, dans ses conclusions, la division du MEF note que la répartition effective du « Fonds Uruguay » diffère quelque peu de celle préalablement établie. « Trois activités financées ne figurent pas dans la répartition initiale du fonds », révèle l’IFG. Il s’agit des dépenses institutionnelles du MAE, des frais de participation à la 68e Assemblée générale de l’ONU et des travaux d’aménagement du Théâtre national.

Concernant ce dernier chantier, pour lequel le ministère de la Culture, le ministère de tutelle de l’ISPAN, a reçu 100 000 dollars, pour les travaux d’aménagement des loges et de la toiture du Théâtre national d’Haïti, l’IGF observe que le contrat de gré à gré signé par la firme EMDD, pour l’exécution de ces travaux, est conforme aux procédures légales.
« L’arrêté du 25 mai 2012 fixe à 40 millions de gourdes le seuil pour les marchés publics de travaux. Ainsi, ce contrat d’un montant d’environ 10 millions de gourdes, inférieur au seuil fixé, a été attribué selon les conditions prévues par la loi pour un contrat de gré à gré », informe ce rapport.

Pour rappel, l’IGF, une branche du MEF, n’a pas omis de préciser que cette mission de vérification a été réalisée conformément à ses attributions stipulées dans le décret portant sa création : « auditer périodiquement le système d’investissement public, notamment la gestion de fonds, programmes et projets d’investissement public, et ce indépendamment des sources de financement. »

AUTEUR

Patrick SAINT-PRE


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