MosaikHub Magazine
Rallonge/Présidence provisoire

Privert promet d’appliquer la « feuille de route » de l’Assemblée nationale

mardi 5 juillet 2016

Aucune date n’est encore fixée pour la poursuite de l’Assemblée nationale mise en continuation la semaine dernière. Les groupes parlementaires pro et anti-Privert n’arrivent toujours pas à s’accorder sur l’ordre du jour de la séance. Dans l’attente de la décision de l’Assemblée nationale, le président provisoire a confié lundi au Nouvelliste qu’il est prêt à appliquer toute éventuelle feuille de route une fois votée par l’Assemblée. Entre-temps, Jocelerme Privert est ferme au poste même s’il a souligné au journal qu’il ne prend aucune décision pouvant engager l’Etat.

Jocelerme Privert est dans une situation inconfortable. Depuis le 14 juin dernier, il est en attente d’une décision de l’Assemblée nationale sur une prolongation ou pas de son mandat arrivé à terme depuis environ 20 jours. S’il devait continuer à diriger le pays, il aurait à suivre une feuille de route que lui imposeront les parlementaires. « Les actes du corps législatif sont exécutoires dès leur publication au journal officiel Le Moniteur. Moi en tant que parlementaire dans l’âme, ne me demandez pas de me mettre en porte à faux avec une décision d’une assemblée souveraine », a-t-il soutenu dans une interview exclusive accordée lundi au Nouvelliste.

M. Privert a toutefois souligné que la feuille de route ou tout autre document émanant du Parlement ne peut porter que sur les responsabilités qui sont reconnues au président par la Constitution.

Entre-temps, en attendant la décision de l’Assemblée nationale de prolonger ou pas son mandat, « je continuerai, en tant que responsable, à assumer toutes mes responsabilités. Tant que l’Assemblée ne se prononce, je ne peux abandonner mes responsabilités… »

Pour ses détracteurs qui estiment que dans sa situation il ne devrait pas prendre des décisions qui engagent l’Etat, Jocelerme Privert a fait remarquer que la Constitution a clairement établi les responsabilités de chacune des deux têtes de l’exécutif. « L’exécutif est exercé par deux entités, la présidence et le gouvernement. Le Premier ministre conduit l’action gouvernementale et le président est garant du bon fonctionnement des institutions », a-t-il rappelé.

« Je n’ai eu à prendre au cours de cette période aucune décision au nom de l’Etat, mais je continuerai à m’assurer que les institutions de l’Etat fonctionnent comme prévu par la Constitution. Il y a deux décisions que le président peut seul prendre, d’abord convoquer le Parlement à l’extraordinaire, ce que j’avais fait le 12 mai et deuxièmement, nommer le Premier ministre par arrêté présidentiel… », a-t-il expliqué.

Que faites-vous à longueur de journée Monsieur le président ?

« A longueur de journée je suis au travail. La semaine dernière, j’ai eu différentes rencontres avec différents acteurs de la société. J’ai eu des rencontres avec le Conseil électoral et l’ONI. Je m’assure que toutes les actions qui devaient être prises pour la tenue du premier tour des élections programmé au 9 octobre puissent être concrétisées », a répondu le chef de l’Etat dont le mandat est arrivé à terme depuis le 14 juin dernier selon l’accord du 5 février 2016.

Jocelerme Privert a confié au Nouvelliste qu’il continue de rencontrer les parlementaires sur la situation actuelle. « Je suis en contact permanent avec les parlementaires. Pas plus tard que cet après-midi (N.D.L.R : lundi après-midi), j’ai eu une rencontre avec un groupe de parlementaires. Plus tard, j’aurai une rencontre avec un groupe de députés. Ce midi, j’ai eu une conversation avec le président de la Chambre des députés. Hier, j’ai eu une autre conversation avec le président du Sénat de la République », a-t-il dit.

« Des relations parfaites entre moi et le Premier ministre »

Si des informations laissent croire que les relations sont tendues entre lui et son Premier ministre, pressenti pour le remplacer comme le réclament les parlementaires de PHTK et alliés, Jocelerme Privert a fait savoir au Nouvelliste que les relations entre lui et Enex Jean-Charles sont « harmonieuses, parfaites… Deux fonctionnaires de carrière, deux citoyens haïtiens qui conjuguent leurs efforts pour garantir la paix et la stabilité politique sans aucun contentieux. Nous sommes tous deux conscients de la gravité de la situation et nous mettons tout en commun pour sortir le pays de cet abîme… », a-t-il dit.

Jocelerme Privert a souligné qu’il a présidé vendredi dernier le Conseil des ministres au cours duquel ils se sont mis d’accord sur le budget et sur des points d’intérêts généraux. « Hier matin (N.D.L.R : dimanche matin), avant son départ pour Guyana le Premier ministre était passé chez moi, on a pris un café et mangé de la soupe ensemble », a-t-il dit pour montrer que tout va bien entre lui et le chef de la Primature.

Alors qu’il devait prendre part le mois dernier à l’inauguration des travaux d’agrandissement du canal de Panama, un groupe de sénateurs avaient écrit aux autorités de ce pays pour leur faire savoir que Jocelerme Privert n’est plus président d’Haïti. Interrogé sur ce sujet, M. Privert a répondu en ces termes : « Est-ce qu’on parle d’individu ou d’institution ? Moi je suis un institutionnel. Je ne me suis pas rendu à Panama pas parce qu’il y a une lettre dont je ne suis même pas au courant, mais parce que j’avais estimé que la situation qui prévalait dans le pays était plus importante qu’un voyage à Panama. La présidence et le gouvernement étaient élégamment représentés », a-t-il indiqué.

« Qui a intérêt à ce que les élections ne se tiennent pas ? Qui a intérêt à ce que le pays retombe dans le chaos et l’anarchie ? Qui a intérêt à ce que le pays se réveille en 2017 sans un président démocratiquement élu ? », se demande perplexe le locataire du palais national. « Il y a un choix à faire entre le chaos et la stabilité. Moi, je fais le choix de la stabilité politique », a affirmé le président provisoire.

Pour ceux qui croient que Jocelerme Privert va favoriser son clan politique pendant les prochaines élections, il a fait savoir qu’il n’interfère jamais dans les affaires du CEP. « J’ai gardé une très grande neutralité et un recul par rapport au Conseil électoral et j’ai exhorté tous les membres du gouvernement de s’abstenir de toute interférence dans le processus », a-t-il assuré.

L’ex-sénateur ne rate jamais une occasion pour souligner qu’il est arrivé au pouvoir avec pour mission fondamentale la poursuite du processus électoral. Il reconnaît cependant qu’il disposait de 120 jours pour accomplir cette mission. « Il était clair aussi que depuis la préparation de l’accord, des circonstances indépendantes de notre volonté peuvent empêcher que les délais soient suffisants. Ce qui est le cas aujourd’hui. On était tellement conscient de cet impondérable que dans l’accord il est dit que l’Assemblée nationale, le cas échéant, prendra les dispositions qui s’imposent », a-t-il rappelé.

Jocelerme Privert a appelé les parlementaires à assumer leurs responsabilités envers leurs mandants et envers le pays. Les parlementaires sont encore en négociation pour l’adoption de l’ordre du jour de l’Assemblée nationale. Sans une entente préalable sur le document, il n’y aura pas de séance.

AUTEUR

Robenson Geffrard

rgeffrard@lenouvelliste.com


Accueil | Contact | Plan du site | |

Creative Commons License

Promouvoir & Vulgariser la Technologie