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12 décembre 1098. Les croisés affamés s’emparent de Ma’arrat avant de faire rôtir quelques habitants

vendredi 12 décembre 2014

C’est qu’une bonne croisade, ça creuse l’appétit. Comme les vivres viennent à manquer, il faut vivre sur le Sarrasin.

En route pour Jérusalem, les milliers de croisés crèvent la dalle autant que des adeptes du régime Dukan. Rien à manger dans ce pays écrasé par le soleil, sinon des sauterelles. La dernière fois qu’ils ont fait bombance, c’était à Antioche. Mais c’est déjà loin. Les provisions manquent. Sous la conduite de Bohémond de Tarente et de Raymond de Saint-Gilles, ils poursuivent néanmoins leur chevauchée vers le sud. Au passage, ils massacrent et pillent allègrement les populations locales.

Fin novembre 1098, les troupes chrétiennes commencent à se rassembler devant Ma’arrat, une modeste cité agricole vivant de la vigne, des olives et des figues. Ils sont bientôt plusieurs milliers de croisés à faire le siège de la ville. Dans un premier temps, les habitants ne s’affolent guère, persuadés d’être à l’abri derrière les épaisses murailles entourées d’un profond fossé. D’autant qu’en juillet, ils ont mis en déroute la petite armée de Raymond Pelet, seigneur d’Alès, venu lancer un premier assaut.

Mais, cette fois-ci, l’armée croisée commandée par Bohémond et Raymond de Toulouse est infiniment plus nombreuse. L’hiver approchant et la faim se faisant de plus en plus féroce, les chefs chrétiens n’ont pas de temps à perdre dans un long siège. Ils multiplient les attaques. Durant vingt jours, les habitants de Ma’arrat les contiennent héroïquement. Les croisés deviennent enragés. Ils imaginent des montagnes de nourriture à l’intérieur de la cité. Des mezze en pagaille. En attendant, ils se nourrissent sur l’ennemi. L’un des croisés, Foucher de Chartres, écrira dans son histoire des croisades : "Je ne puis redire sans horreur comment plusieurs des nôtres, transportés de rage par l’excès du besoin, coupèrent un ou deux morceaux de fesses d’un Sarrasin déjà mort et, se donnant à peine le temps de les rôtir, les déchirèrent de leurs dents cruelles." À la grande fureur d’Yves Camdeborde de Masterchef, car aucun ne pense à mettre du piment d’Espelette...

Enfants sur des broches

Finalement, le 11 décembre, les croisés parviennent à franchir la muraille en utilisant une tour en bois. Les défenseurs refluent en masse vers le centre de la ville. Comme le jour tombe, ils supposent que les chrétiens arrêteront de combattre pour attendre le lendemain matin. Erreur. Ils poursuivent le combat. Le 12 décembre 1098, les chefs de la cité font savoir à Bohémond qu’ils sont prêts à négocier. Celui-ci leur fait dire qu’en cas de reddition immédiate et totale, tous auront la vie sauve. Les habitants de Ma’arrat déposent donc les armes en confiance. Après tout, ils n’ont pas affaire aux combattants de l’État islamiste... Manque de jugeote : les chrétiens massacrent les musulmans jusqu’au dernier. Les chroniques parlent de 20 000 morts. Les croisés sont cruellement déçus, car Ma’arrat compte peu de provisions. En tout cas, pas de quoi rassasier tous les soldats, qui se mettent alors à regarder les morts d’un oeil gourmand.

Cyril Lignac dicte deux ou trois recettes à Rodolphe de Caen qui note : "À Ma’arrat, nos troupes font bouillir les païens adultes dans des chaudrons ; ils ont empalé les enfants sur des broches pour les dévorer grillés." Charmant. La réputation gastronomique française en prend un rude coup.

Les massacres des croisés et leur cannibalisme font une profonde impression sur les peuples du Moyen-Orient. Durant des siècles, les Occidentaux vont conserver une réputation de grande férocité et de cannibalisme. Vis-à-vis des sarrasins, mais aussi des juifs, et même des chrétiens orthodoxes, dont certains passent également à la casserole. La littérature arabe va jusqu’à prétendre que cette grande bouffe n’a pas été provoquée par la seule faim, mais également par le besoin de ravaler le musulman au rang d’animal.


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